A Nouméa comme à Paris, le dossier est bouillant. L’avenir institutionnel de la Nouvelle-Calédonie, après les trois référendums d’autodétermination (2018, 2020 et 2021), où le «non» à l’indépendance l’a chaque fois emporté, triture les méninges de l’exécutif. Ce lundi, les députés doivent débattre d’un projet de loi visant à réformer le corps électoral, une initiative contestée par le camp indépendantiste. Alors que les tensions sont vives sur l’archipel, les socialistes exhortent donc l’exécutif à calmer le jeu. Dans un courrier adressé à Emmanuel Macron le 7 mai, les présidents des groupes à l’Assemblée et au Sénat, Boris Vallaud et Patrick Kanner, alertent sur une réforme qui «conduit au blocage».
Les deux parlementaires appellent le chef de l’Etat à «favoriser la reprise du chemin d’un dialogue». L’outil qu’ils prônent ? Une «mission du dialogue», dont le Premier ministre serait le «garant», comme l’ont proposé trois anciens chefs de gouvernement, Jean-Marc Ayrault, Manuel Valls et Edouard Philippe. Soit aussi ce qu’avait lancé Michel Rocard après le drame d’Ouvéa en 1988.
Les socialistes plaident également pour repousser la réforme, «le calendrier retenu» agissant «comme un étau en comprimant le temps de la négociation». Et les parlementaires d’assurer : «L’accord global est à portée de main, et une réforme constitutionnelle pourra être menée si elle est le fruit d’une volonté partagée.» Une demande tombée dans l’oreille élyséenne ?
Hier, Macron a encouragé le gouvernement à reprendre les négociations. Il a surtout annoncé que le Congrès (réuni à Versailles si l’Assemblée adopte le projet de loi dans les mêmes termes qu’au Sénat), ne serait pas convoqué tout de suite, laissant le temps du dialogue… Une inspiration de son prédécesseur socialiste, François Mitterrand, qui aimait «laisser le temps au temps» ?
Pour le député socialiste Arthur Delaporte, ce signal présidentiel envoyé était «attendu». Mais «l’Elysée ne veut pas aller plus loin que ce flou» entourant le calendrier. «Le projet de loi constitutionnel prévoit une entrée en vigueur le 1er juillet 2024. Théoriquement, il faudrait convoquer le Congrès en juin.» Et l’élu du Calvados de redouter : «Si c’est le 17 ou 24 juin, on est dans la seringue.»