Alors que Caroline Cayeux, ministre des Collectivités territoriales, a annoncé sa démission lundi, elle rejoint une longue liste de ministres qui ont dû quitter le gouvernement depuis 2017. La plupart avaient sous-évalué leur déclaration de patrimoine.
Richard Ferrand et les Mutuelles de Bretagne en 2017
Richard Ferrand avait repris les rênes des Mutuelles de Bretagne en 1993 qui étaient à ce moment-là en faillite. Après avoir redressé la société, cet ancien socialiste devenu un pilier de la macronie décide de louer des locaux commerciaux, mais pas à n’importe qui : à sa compagne. A peine nommé ministre de la Cohésion des territoires, Richard Ferrand est alors épinglé par le Canard enchaîné qui révèle l’affaire en 2011. Cette location n’est ni illégale ni préjudiciable au contribuable mais pose la question du conflit d’intérêts.
Le procureur de Brest ouvre une enquête en 2017. Richard Ferrand refuse de quitter le gouvernement. Cependant, au lendemain de la victoire de La République en marche, il quitte le gouvernement le 19 juin 2017, et succède à François de Rugy à la présidence de l’Assemblée nationale, poste qu’il occupe de septembre 2018 à juin 2022.
Richard Ferrand sera mis en examen pour «prise illégale d’intérêts» en septembre 2019. Mais la Cour de cassation confirme finalement la prescription des faits le 5 octobre 2022.
Laura Flessel et sa société de droit à l’image
Quelques jours après Nicolas Hulot, c’est la ministre des Sports Laura Flessel qui annonce le 4 septembre 2018 son départ pour des «raisons personnelles». Le Canard enchaîné et Mediapart évoquent plutôt une sous-déclaration fiscale. Les services de Bercy ont saisi la Commission des infractions fiscales pour fraude concernant une société de droit à l’image. L’ancienne multimédaillée d’escrime est remplacée par Roxana Maracineanu, ancienne championne de natation.
François de Rugy, les homards et le financement de EE-LV
En 2018, alors qu’il vient de remplacer Nicolas Hulot au ministère de la Transition écologique, François de Rugy annonce sa démission après une semaine de forte pression née des révélations de Mediapart concernant des dîners de gala organisés à l’Hôtel de Lassay en présence de nombreux homards, lorsqu’il était président de l’Assemblée nationale. Juste après l’annonce de sa démission, le site d’information a publié une nouvelle enquête révélant que François de Rugy a, en tant que député en 2013 et 2014, utilisé une partie de son indemnité représentative de frais de mandat pour financer son parti politique, Europe écologie-les Verts (EE-LV). Or les sommes allouées aux députés pour leurs frais de mandat ne sont pas censées, par définition, servir à cela. L’ancien ministre a poursuivi en justice Mediapart pour diffamation. Mais le tribunal judiciaire de Paris a prononcé la relaxe du média.
Delevoye et les «oublis» des mandats
Plusieurs médias dont le Parisien et Capital ont révélé que le haut-commissaire aux retraites, Jean-Paul Delevoye, n’avait pas déclaré plusieurs mandats à la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique (HATVP). «Une omission par oubli», plaide-t-il. Accusé aussi d’avoir minimisé ses revenus, «l’homme-clé» de la reforme des retraites présente sa démission à un Emmanuel Macron contraint de l’accepter, le 16 septembre 2019.
Une enquête est ouverte pour «abus de confiance», «abus de biens sociaux» et recels. Jean-Paul Delevoye sera condamné le 2 décembre 2021 à quatre mois de prison avec sursis et 15 000 euros d’amende.
Alain Griset condamné pour «déclaration incomplète de son patrimoine»
Alain Griset est le premier ministre en exercice à comparaître devant un tribunal correctionnel. Une enquête avait été ouverte en novembre 2021. Le ministre délégué aux PME est soupçonné d’avoir volontairement caché à la HATVP un plan d’épargne en actions d’une valeur de 171 000 euros. Des fonds qui proviennent du bureau de la Confédération nationale de l’artisanat des métiers et des services du Nord.
Après l’ouverture de l’enquête, Griset est condamné le 8 décembre 2021 à six mois de prison avec sursis, ainsi qu’à une inéligibilité de trois ans avec sursis, pour «déclaration incomplète ou mensongère de sa situation patrimoniale». Il présente sa démission le même jour et fait appel de sa condamnation. En mai 2022, il est reconnu coupable «d’abus de confiance et de faux et usage de faux» et ainsi condamné à un an d’emprisonnement avec sursis, trois ans d’inéligibilité et 5 000 euros d’amende. Il a fait appel des deux condamnations.
Le Modem et le scandale des assistants parlementaires
Le 9 juin 2017, le parquet de Paris ouvre une enquête visant le Modem, présidé par François Bayrou, sur des soupçons d’emplois fictifs d’assistants d’eurodéputés. Plusieurs assistants parlementaires auraient travaillé pour le Parlement européen et exercé des fonctions au sein du parti. Une affaire qui intervient seulement quelques mois après la prise de fonction d’Emmanuel Macron. Corinne Lepage, ancienne eurodéputée, avait dénoncé cette pratique dans son livre Mains propres, plaidoyer pour la société civile au pouvoir : «Lorsque j’ai été élue au Parlement européen en 2009, le Modem avait exigé de moi qu’un de mes assistants parlementaires travaille au siège parisien. J’ai refusé, en indiquant que cela me paraissait d’une part contraire aux règles européennes, et d’autre part illégal.»
Après cette affaire, une vague de démission a lieu. Le 20 juin, Sylvie Goulard, devenue ministre des Armées, quitte le gouvernement, suivie de François Bayrou (Justice) et de Marielle de Sarnez (Affaires européennes). Fin 2019, Sylvie Goulard et Marielle de Sarnez (morte en 2021) sont mises en examen pour «détournement de fonds publics» et Bayrou pour «complicité» de ce délit.