Peut-on accoler à une députée du Rassemblement national les qualificatifs «fasciste», «néofasciste» ou «néonazie» ? C’est la question qui occupera à nouveau la 17e chambre du tribunal correctionnel de Paris (compétente dans les délits dits «de presse») saisie par Tiffany Joncour, députée d’extrême droite de la 13e circonscription du Rhône. L’élue poursuit Allan Brunon, militant à La France insoumise, lui reprochant ses tweets «injurieux» datant de décembre dernier. Le conseil de l’intéressé dénonce pour sa part une «procédure bâillon». Un nouvel exemple de la guérilla sémantique menée de longue date par la lepénie pour tenter d’imposer sa version du sens des mots, et d’interdire des termes qu’il juge disqualifiants. L’audience a été fixée au 12 février prochain.
L’histoire n’est pas neuve et la vindicte du parti va même jusqu’à la qualification «extrême droite». En 1995 déjà, Jean-Marie Le Pen refusait cette étiquette et avait traîné Libération devant les tribunaux pour la lui avoir attribuée. La justice l’avait débouté, considérant qu’il s’agissait, de sa part, d’un «abus de droit», visant, «de façon délibérément dissuasive, à censurer le vocabulaire du journaliste». Rebelote en 1997, en appel, lorsque les juges avaient estimé que «rien n’est plus contraire à la liberté d’expression que l’imposition d’une sémantique, et rien n’est plus contraire à la démocratie qu’une sémantique politique obligatoire»