De l’usine aux salles obscures, Philippe Poutou prouve que des passerelles existent entre deux milieux apparemment éloignés. L’ancien ouvrier de l’usine automobile Ford à Blanquefort, mis au chômage en 2019, met le cap sur le monde du septième art. Depuis le 1er septembre, il travaille pour la société de distribution de films Urban Distribution, selon des informations du Film français. Sa mission : «Prendre en charge la promotion des films hors média».
Tout un programme, finalement pas si éloigné de son activité militante puisque les longs-métrages feront écho à ses nombreux combats. «Je me retrouve complètement dans les valeurs défendues par les films d’Urban : l’anticapitalisme, l’antiracisme, le féminisme et l’écologie. C’est un vrai métier, pour lequel mes nouveaux collègues sont en train de me former», justifie l’ex-candidat à l’élection présidentielle dans le Parisien. Il dit aussi ne pas avoir «l’impression de se contredire». Dans sa déclaration d’intention, Urban Distributions dévoile d’ailleurs avoir «vocation à distribuer des films d’auteur sans condition de genre, de budget ou de nationalité».
Un CDI à mi-temps
Dans la liste des derniers films portés par cette petite société, on retrouve des œuvres aussi diverses que Chut… !, sur le combat contre la société marchande, Kombinat sur les métallos, ou la Femme du fossoyeur, sur un couple pauvre de la banlieue de Djibouti. Sans oublier Il nous reste la colère, au cinéma le 30 septembre. Réalisé par Jamila Jendari et Nicolas Beirnaert, il met en scène la lutte des travailleurs de Ford… dont un certain Philippe Poutou. Il participe d’ailleurs à une tournée de promotion du film. Il était, le week-end dernier, à la Fête de l’Huma pour une discussion après projection. Le premier film auquel il sera confronté, Black is Beltza 2 : Ainhoa, en salles le 16 novembre, raconte le parcours de militants basques qui se battent pour leur liberté sur fond de répression dans les dernières années de la Guerre froide. L’occasion pour Poutou de dévoiler ses goûts cinématographiques : il raffole de «films sociétaux», particulièrement ceux réalisés en Amérique latine, en Asie et en Europe de l’Est.
Au chômage depuis trois ans, le trotskiste réfléchissait à la meilleure manière de rebondir. En avril, dans une interview à Libé, il révélait avoir «une promesse d’embauche». Il parlait alors, sans entrer dans les détails, d’un «poste dans la culture, dans le milieu du spectacle, du cinéma». «Il me tarde de commencer. Un défi de plus dans ce secteur en crise», vantait-il, après avoir expliqué que ses engagements politiques et syndicaux étaient un frein pour une embauche dans l’industrie. Le contrat signé avec la société de productions, un CDI à mi-temps selon le Parisien, laisse la possibilité à Philippe Poutou de conserver sa casquette de conseiller municipal à Bordeaux. Et de rester porte-parole du Nouveau parti anticapitaliste (NPA). Cette fois de façon bénévole.