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Libération
À droite toute

Lecornu conteste l’existence d’un moratoire sur le solaire et l’éolien pour complaire au RN

Le média «Contexte» a affirmé jeudi 25 septembre que l’exécutif s’apprêtait à mettre un coup d’arrêt aux énergies renouvelables. Mais le Premier ministre dément ces informations dans une interview donnée au «Parisien» ce vendredi 26 septembre.

Une centrale photovoltaïque à Ungersheim, le 17 décembre 2013. (Pascal Bastien /Divergence)
Publié le 26/09/2025 à 16h28, mis à jour le 26/09/2025 à 18h26

«Revenir aujourd’hui, par voie réglementaire, sur une décision prise par le Parlement nous semble particulièrement surprenant.» Sous des dehors policés, une indignation sourde transparaît dans la lettre adressée ce vendredi 26 septembre par France renouvelable, l’association représentative de la filière à Sébastien Lecornu. Le média en ligne Contexte rapportait en effet jeudi 25 septembre, que le nouveau Premier ministre était prêt à publier le décret de la troisième programmation pluriannuelle de l’énergie (PPE3), la feuille de route énergétique de la France, en prévoyant un «moratoire sur le solaire et l’éolien terrestre» afin d’éviter une censure du Rassemblement national.

En juin à l’Assemblée, un amendement proposant un moratoire anti-éolien et photovoltaïque (c’est-à-dire une suspension momentanée des activités de cette filière) avait été déposé dans la proposition de loi Grémillet sur la programmation pluriannuelle de l’énergie par la droite des Républicains, avec le soutien de l’extrême droite. Face aux réactions indignées du secteur et de la gauche, les macronistes avaient finalement enterré leur propre texte, en dépit de la campagne du ministre de l’Intérieur Bruno Retailleau en faveur d’une telle mesure.

Sauf que Sébastien Lecornu qualifie cette information de «complètement fausse et mensongère» dans une interview donnée au Parisien vendredi 26 septembre. «ll n’est pas question de revenir sur nos ambitions énergétiques car la décarbonatation est une priorité pour notre souveraineté», assure le locataire de Matignon, qui alerte sur la nécessité de «sortir de certaines dépendances». Le même rappelle toutefois de façon sibylline que «comme pour tout euro d’argent public dépensé, aucune rente ne sera tolérée, n’en déplaise à certains lobbys».

«Plus de 80 000 emplois en péril»

Contexte expliquait pourtant la veille que l’exécutif «aurait élaboré un scénario RN compatible, impliquant de réévaluer les soutiens publics aux énergies renouvelables et, le temps que cela soit fait, d’imposer un moratoire sur le solaire et l’éolien terrestre». «Dans la pratique, ça signifierait que le gouvernement déciderait de rétablir par décret le moratoire que l’Assemblée nationale a rejeté cet été» au printemps, a réagi Jules Nyssen, le président du Syndicat des énergies renouvelables (SER), sur LinkedIn.

Dans un communiqué, son organisation a estimé qu’«un tel moratoire constituerait aussi un déni énergétique, car en arrêtant brutalement la transition énergétique, ce sont les énergies fossiles qui sortiront grandes gagnantes». «Une telle décision mettrait immédiatement en péril plus de 80 000 emplois», a affirmé France Renouvelables, qui porte la voix du secteur et ajoute que cela «maintiendrait la France dans une situation de dépendance pour les vingt prochaines années, en dépit de toute rationalité».

Une «hypothèse de travail»

«La transition énergétique ne doit pas être sacrifiée au nom de manipulations politiques», a déclaré Nicolas Nace, de Greenpeace France. «La PPE n’est pas une monnaie d’échange pour échapper à une motion de censure», a-t-il ajouté. Selon Contexte, qui citait une source proche du dossier, ce plan n’était qu’une «hypothèse de travail». Elle consisterait à publier la PPE toute en chargeant un ou deux économistes de réexaminer les modalités de soutien aux énergies renouvelables.

En attendant les conclusions de cette mission, un moratoire sur les énergies renouvelables terrestres serait mis en place et aucun appel d’offres ne serait lancé. «Que ce soit en train de se dealer ou que ça fasse partie des échanges avec le RN et d’autres partis politiques, c’est fort probable, a estimé un connaisseur du secteur énergétique auprès de l’AFP. Mais que ça soit imminent, ce serait étonnant […], je ne vois pas quelle serait l’urgence de le faire avant le discours de politique générale.»

La PPE3 a donné lieu à des débats enflammés dans la classe politique pendant tout le printemps entre pronucléaires et partisans des renouvelables. Le texte est très attendu par les acteurs de l’énergie pour lancer des appels d’offres, sécuriser des investissements, anticiper les besoins de formation et d’emploi et prévoir les infrastructures.

Mise à jour à 18 h 26 avec les déclarations de Sébastien Lecornu dans «le Parisien».