Le feuilleton sudiste continue chez Les Républicains (LR). Après une spectaculaire querelle entre le parti et son candidat aux régionales de Provence-Alpes-Côte d’Azur, Renaud Muselier, c’est le maire de Toulon, Hubert Falco, qui a annoncé ce mercredi quitter le parti de droite. «Je décide de reprendre ma liberté, je quitte donc le parti Les Républicains», a déclaré l’élu au Figaro, critiquant «les procès d’intention et les agitations du microcosme LR au niveau parisien, [qui] me semblent bien dérisoires et déplacés».
Ce départ intervient après l’invraisemblable séquence ouverte dimanche par le Premier ministre, Jean Castex. Celui-ci avait annoncé une alliance en Paca entre la liste de La République en Marche (LREM), menée par la secrétaire d’Etat Sophie Cluzel, et celle de Renaud Muselier, président sortant. L’accord avait affolé la droite, qui voit dans tout rapprochement le prélude à son absorption par le parti présidentiel. Mis au pied du mur par son propre parti, Muselier a finalement cédé sur l’essentiel mardi soir, refusant d’intégrer à ses listes tout ministre ou parlementaire de la majorité.
Réseau amoureusement cultivé
Ce résultat a consterné les quelques partisans d’une authentique alliance entre la droite et le macronisme, à l’image d’Hubert Falco et du maire de Nice, Christian Estrosi. «Aujourd’hui LR, qui est devenu un petit RPR, croit pouvoir gagner seul ? Les copains, réveillez-vous !» exposait ce dernier à Libération en octobre. «Pourquoi ne pourrais-je pas travailler avec Emmanuel Macron ? questionnait à la même époque Falco dans le Figaro. C’est le président de la République, c’est un républicain, un homme brillant et de dialogue.» Sitôt connu le projet d’alliance entre Cluzel et Muselier, il lui avait apporté son concours, y voyant le meilleur obstacle à une victoire du Rassemblement national. «Qu’essayons-nous de faire en Paca ? Simplement ce que nous avons fait en 2001 quand on est venu me chercher parce que Toulon était aux mains du Front national et qu’il fallait aller au combat», expliquait-il lundi au Point.
Désormais, «je ne me considère plus membre d’un parti qui m’a traité de malfaisant, a-t-il explosé sur BFMTV, ce mercredi. Est-ce qu’on veut le FN [sic] ou combattre le FN ? […] Ma vie politique a toujours été simple, je sais d’où je viens, le FN est l’ennemi que je veux combattre». Membre du gouvernement sous Jacques Chirac et Nicolas Sarkozy, ancien président du conseil général du Var, quatre fois élu maire de Toulon, Falco est une prise de premier ordre pour le chef de l’Etat. L’homme, c’est vrai, n’annonce pas rejoindre le parti présidentiel. Il intègre en revanche un réseau amoureusement cultivé par l’Elysée : celui des maires issus de la droite et plus ou moins ouvertement acquis au macronisme. Lui comme Estrosi ont récemment déjeuné avec Emmanuel Macron. Son départ de LR «est cohérent», a sobrement commenté la direction du parti, contactée par Libération.
Estrosi «sévèrement recadré»
Les regards se portent désormais vers le maire de Nice. Imitera-t-il son collègue ? A droite, on spécule depuis mardi sur les intentions de l’élu, très critiqué chez LR pour sa défense de l’alliance avec LREM. Une scène a marqué les esprits, survenue mardi soir devant la commission d’investiture du parti. «Estrosi y a fait une très longue intervention, en disant que ceux qui s’opposaient à la stratégie d’ouverture renonçaient au combat contre le RN», rapporte un participant. La tirade a passablement agacé l’assistance, à commencer par le président de LR Christian Jacob, «qui a rappelé qu’il savait ce qu’était être en triangulaire face au RN et qu’il n’avait de leçon à recevoir de personne».
Estrosi «a été recadré sévèrement par Jacob, ferme comme je l’avais rarement vu, confirme un autre. Cela s’est fini sous les applaudissements d’une salle pleine à craquer. J’imagine que Christian [Estrosi] l’a mal vécu : j’ai bien cru à un moment qu’il allait quitter la salle». Contactés par Libération, le maire de Nice et son entourage n’avaient pas réagi en début d’après-midi. L’homme, jusqu’à nouvel ordre, reste la tête de liste de LR dans les Alpes-Maritimes pour les élections départementales.