Face à la menace de plusieurs auteurs de boycotter le festival littéraire prévu dans la ville comtoise, la maire de Besançon, Anne Vignot, fait machine arrière. Le philosophe Raphaël Enthoven, dont la participation à ce festival littéraire avait été déprogrammée après des propos polémiques sur Gaza, y sera finalement le bienvenu, mais avec une «sécurisation adaptée», a annoncé lundi l’édile, qui se défend d’avoir voulu «censurer» l’essayiste.
«Les positions tenues par Raphaël Enthoven cet été m’ont amenée à proposer […] de déprogrammer sa venue au festival Livres dans la boucle», prévu du 19 au 21 septembre, «pour éviter que la sérénité de cet événement soit remise en cause avec des risques de troubles à l’ordre public», a expliqué la maire écologiste dans un communiqué. «Aujourd’hui, le monde littéraire traduit cela comme de la censure, ce qui n’a jamais été mon intention et ne le sera jamais», a ajouté Anne Vignot. «C’est pourquoi j’ai posé la question de la reprogrammation de Raphaël Enthoven aux élus du bureau exécutif du Grand Besançon, qui s’est prononcé pour. La sécurisation sera adaptée.»
Dans le quotidien régional l’Est républicain, David Foenkinos, président d’honneur du festival, a salué ce «signe d’apaisement». Selon France Inter, l’écrivain avait un temps envisagé d’annuler sa propre participation.
«Délit d’opinion»
A l’origine de l’imbroglio, des propos tenus le 15 août sur le réseau social X par Raphaël Enthoven - qui vient de publier l’Albatros en cette rentrée littéraire. «Il n’y a AUCUN journaliste à Gaza. Uniquement des tueurs, des combattants ou des preneurs d’otages avec une carte de presse», avait-il alors affirmé.
L’agglomération de Besançon, dirigée par la gauche, avait alors annoncé le 4 septembre qu’elle avait annulé la participation du philosophe à cet événement littéraire en raison de ces déclarations dont elle considérait qu’elles pouvaient «remettre en cause la sérénité du déroulement» de ce festival.
Après l’annonce de son éviction, l’écrivain avait accusé la maire de «rétablir le délit d’opinion». Cette décision avait par ailleurs provoqué un certain émoi dans le milieu littéraire, certains écrivains et éditeurs annonçant qu’ils ne viendraient pas à Besançon tandis que d’autres réservaient leur décision dans l’attente d’une nouvelle communication de la mairie.
Après le revirement de la maire, l’essayiste a réagi en soulignant sur X qu’Anne Vignot «a sûrement l’intention de ne jamais censurer, mais elle vient de le faire, et c’est la raison pour laquelle elle rétropédale». «Il va de soi que je me rendrai à son invitation chaleureuse, et que j’aurai le plaisir de parler LITTERATURE avec les Bisontins», a-t-il conclu.
Dans un communiqué, le Centre national du livre s’est «réjoui» de ce rétropédalage, affirmant «son attachement indéfectible à la liberté de création et de programmation».