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Libération
Budget 2025

Réforme des retraites : Yaël Braun-Pivet évoque une pause pour «rediscuter», la droite s’oppose sur le financement

La présidente de l’Assemblée nationale a entrouvert une porte ce dimanche 12 janvier à la demande principale de la gauche en contrepartie d’un accord de non-censure du gouvernement Bayrou sur le budget 2025. Mais la partie est encore loin d’être jouée.
Yaël Braun-Pivet à Matignon, le 19 décembre 2024. (Xose Bouzas/Hans Lucas. AFP)
publié le 12 janvier 2025 à 15h51
(mis à jour le 12 janvier 2025 à 18h01)

A deux jours de la déclaration de politique générale de François Bayrou, les discussions se poursuivent sur le point principal des négociations entre le gouvernement et la gauche sur le budget 2025. La présidente de l’Assemblée Yaël Braun-Pivet a déclaré ce dimanche 12 janvier «ne pas être opposée par principe» au fait d’«arrêter» brièvement la réforme des retraites, le temps de la remettre à plat. «Ce qui me convient, c’est qu’on rediscute. Après, s’il faut arrêter pour rediscuter avec un cycle très court de discussion, moi je n’y suis pas opposée par principe, a ouvert la macroniste, au micro de France Inter. Mais ce que je veux dans ces cas-là, c’est qu’on soit d’accord pour mettre vraiment les choses sur la table pendant ces six mois de discussion et qu’on s’engage tous à discuter réellement».

La réforme «n’est pas parfaite», et même «injuste», et «il y a beaucoup de sujets à discuter encore», que ce soit sur la pénibilité, les carrières longues ou les retraites des femmes, a reconnu Yaël Braun-Pivet. Sans toutefois se dire explicitement en faveur d’une «suspension» de la réforme des retraites.

Dans le même temps, le premier secrétaire du Parti socialiste, Olivier Faure, a affirmé au micro de BFMTV attendre du Premier ministre qu’il prononce «un mot très simple» mardi à l’Assemblée nationale : «Suspension». «Au moment où nous nous parlons ce matin, le compte n’y est pas encore», a néanmoins reconnu le patron du PS, rappelant que les discussions sont toujours en cours avec le gouvernement et qu’il ne connaît pas encore les arbitrages du Premier ministre.

«Les petits pas» faits par le gouvernement «sont encore très insuffisants», mais «les choses sont en train de bouger», a estimé Marine Tondelier ce dimanche sur M6. «Quand Emmanuel Macron, François Bayrou et le ministre du Budget, de quoi ils parlent ? De ‘‘comment on rétropédale sur les retraites’’», a enchaîné la cheffe des écologistes.

François Hollande, lui aussi sur un plateau télé ce dimanche midi, a suggéré «l’ouverture d’une négociation avec les partenaires sociaux», pour une période «pas très longue» qui durerait «trois, quatre ou cinq mois», durant laquelle «il serait logique que les effets négatifs de la réforme soient suspendus, donc différer l’application de la loi pour le départ à 64 ans». Sur France 3, l’ancien Président socialiste a enjoint François Bayrou à «entendre que pour durer, il faut faire des compromis avec l’opposition de gauche. Il faut suffisamment de gestes.»

Vers une suspension en 2026 ?

A l’issue des consultations à Bercy ces derniers jours, une option serait arrivée sur la table de François Bayrou : l’idée d’une suspension de la réforme des retraites en 2026, à condition qu’une alternative soit trouvée dans les prochains mois entre les partenaires sociaux et les forces politiques, selon le Parisien.

Mais le centriste doit faire face à de fortes résistances dans le «socle commun» qui le soutient. Gérard Larcher (LR) a porté dans le Parisien samedi un «message clair» : «ni suspension ni abrogation». Le président LR du Sénat met en avant le coût d’une telle mesure, qu’il chiffre à «3,4 milliards d’euros en 2025». Selon le président du groupe PS au Sénat, Patrick Kanner, geler la réforme pendant six mois coûterait «entre 2 et 3 milliards d’euros», prélevables sur le fonds de réserve pour les retraites.

Pas de quoi convaincre Laurent Wauquiez, le président des députés Droite républicaine à l’Assemblée nationale. Suspendre la réforme des retraites «sans scénario alternatif» de financement serait «irresponsable», a-t-il tonné ce dimanche soir, dans une autre interview au Parisien. Cela reviendrait «à sauter dans le vide sans parachute», a illustré le chef de fil des députés LR. «J’ai toujours dit que cette réforme était perfectible, mais pas s’il s’agit de creuser encore plus de déficits», a-t-il estimé.

«Le PS n’obtiendra pas le gel de la réforme. Je vous parie ce que vous voulez que François Bayrou ne pourra pas geler», a tempéré dimanche l’insoumis Eric Coquerel, sur LCI, «notamment parce que le Président s’y opposera». «Il sortira éventuellement des formules alambiquées, par exemple un gel pour six mois. Mais d’un point de vue concret, ça ne veut rien dire», a cinglé le président LFI de la commission des Finances de l’Assemblée nationale, qui a appelé à «arrêter» purement et simplement la réforme des retraites.

Le Premier ministre prononcera mardi à 15 heures sa déclaration de politique générale, dans lequel il fera connaître le cap de son gouvernement, notamment sur la réforme des retraites. La France insoumise a déjà annoncé sa volonté de déposer une motion de censure à l’issue du discours de François Bayrou, qui devrait être examinée jeudi.

Entre-temps, le Sénat aura repris mercredi l’examen du budget, qui doit durer jusqu’à la fin de la semaine. Les sénateurs repartiront de la copie du gouvernement Barnier, et reprendront les discussions au point où ils les avaient laissées en décembre, au début de l’examen de la partie «dépenses». Les députés avaient auparavant rejeté l’ensemble du texte, sans même avoir examiné cette partie dépenses en séance. Une commission mixte paritaire, réunissant sept sénateurs et sept députés, devrait ensuite être rapidement réunie afin de doter la France d’un budget dans les prochaines semaines.

Mise à jour : à 18h01, avec l’ajout de la déclaration de Laurent Wauquiez.