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«Rencontres de Saint-Denis» : le rendez-vous avec Macron boudé à gauche comme à droite

La deuxième réunion de concertation entre le président de la République et les chefs des partis politiques se tient ce vendredi 17 novembre à Saint-Denis, en l’absence des insoumis, des socialistes et des Républicains.
Le patron du PS Olivier Faure (à gauche) et celui de LFI Manuel Bompard (à droite) ne participeront pas à cette réunion de Saint-Denis, à la différence de celle du 30 aout 2023. (Stéphane Lagoutte/Myop pour Libération)
publié le 17 novembre 2023 à 6h56
(mis à jour le 17 novembre 2023 à 10h10)

Le premier round n’avait pas franchement soulevé les foules fin août. Mais revoici, ce vendredi 17 novembre, la deuxième rencontre de Saint-Denis, cette «initiative politique d’ampleur» voulue par Emmanuel Macron consistant en une série de consultation des chefs de partis politiques. Dans sa lettre d’invitation, le 5 novembre, le président de la République expliquait que cette deuxième édition, outre des discussions sur la situation internationale tendue entre la guerre en Ukraine et celle au Proche-Orient, doit notamment servir à discuter d’un changement des règles du référendum. Pas de quoi convaincre une partie des oppositions de remettre le couvert avec le Président.

Moteur de ces rencontres : le souhait d’Emmanuel Macron de «faire nation» après les émeutes urbaines de cet été à la suite de la mort de Nahel, d’après ses confidences aériennes au Figaro Magazine, et surtout tenter de (re) lancer une énième fois son quinquennat. Trois semaines plus tard, le chef de l’Etat levait une partie du voile sur l’ambition de la réunion, promettant de discuter «des projets de loi mais aussi des référendums», et, grâce à un «travail commun» de déboucher sur des «consultations populaires». Arrivés groupés le 30 août, les leaders de la Nupes avaient voulu imposer leur agenda, entre réforme des retraites et taxation des superprofits. Au bout de la nuit, après douze heures de discussion laborieuses, la réunion avait accouché d’une promesse de «conférence sociale» sur les bas salaires. Maigre.

LR laisse une autoroute à l’extrême droite

Si les composantes de la majorité présidentielle seront évidemment présentes, il ne faut pas s’attendre ce vendredi au même casting qu’il y a deux mois et demi. Les rencontres avaient rassemblé face au Président les représentants des six principaux partis d’opposition, composant six des sept groupes d’opposition à l’Assemblée nationale (Liot avait peu apprécié d’être boudé).

Cette fois-ci, ils ne seront que trois, au mieux. A droite, les Républicains, par la voix de leur président Éric Ciotti, ont décliné l’invitation, ne souhaitant pas être «l’alibi d’une énième démarche de communication», et dénonçant «l’absence du président de la République» dimanche 12 novembre à la manifestation contre l’antisémitisme. Dans une lettre ouverte publiée ce vendredi matin, Éric Ciotti a lancé un nouvel angle d’attaque contre Emmanuel Macron, l’accusant de «nourrir» la crise démocratique en «démultipliant» des initiatives en dehors des institutions. «Vous êtes le président de la République française et vous devez en respecter les institutions», a écrit le député des Alpes-Maritimes.

Le parti des Républicains laisse donc le RN seul face à l’exécutif pour défendre un référendum sur l’immigration, car le parti d’extrême droite, toujours friand de dédiabolisation, y retourne. Dans un courrier révélé par vendredi Le Figaro, le président du RN, Jordan Bardella, justifie sa venue par «esprit de responsabilité, mais aussi et surtout avec l’impérieuse exigence que ce rendez-vous aboutisse à des décisions d’intérêt général pour le peuple français».

La gauche en ordre dispersé

Au sein d’une gauche qui digère encore l’explosion de la Nupes, le PCF sera de la partie – comme l’a affirmé Fabien Roussel sur Télématin le 8 novembre – tout comme les Ecologistes (le nouveau nom d’EE-LV). Jeudi 16 novembre, la secrétaire nationale du parti, Marine Tondelier, expliquait au micro de Sud Radio qu’elle ira bien aux rencontres car «sa présence autour de la table» assurerait «qu’on y parlera d’écologie», espère-t-elle.

Première arrivée ce vendredi matin, Marine Tondelier a déclaré que ce type d’échanges était «une bonne chose» dans une «démocratie saine», afin d’éviter de s’enfermer «dans une incommunicabilité préjudiciable et inquiétante». Elle a notamment insisté sur le conflit israélo-palestinien, souhaitant sortir de la réunion avec «des propositions concrètes», citant des demandes de cessez-le-feu et des sanctions contre Israël. Tondelier a affirmé avoir été la seule à évoquer la question lors de la première rencontre de Saint-Denis, et a fustigé la ligne défendue par la France : «Emmanuel Macron a réussi à se mettre à dos l’ensemble des pays de la zone, la diplomatie française, les Français solidaires du peuple palestinien, ceux qui défendent la paix, et même le Crif.»

Arrivé sur place vers 10 heures, Fabien Roussel a lui aussi mis l’accent sur la situation à Gaza, avant de parler d’une «réunion de la dernière chance», évoquant l’échec de la première rencontre sur la question du pouvoir d’achat. Il a aussi affirmé vouloir présenter des propositions concernant la réforme constitutionnelle voulue par le gouvernement.

En revanche, ce jeudi, le premier secrétaire du Parti socialiste Olivier Faure a confirmé dans un courrier adressé au président et publié sur X (ex-Twitter) la non-participation de son parti, refusant de «cautionner» un possible référendum sur l’immigration et de participer à une «mise en scène». De son côté, la France Insoumise avait déjà annoncé dans un communiqué le 7 novembre qu’elle n’y enverrait pas ses dirigeants. Rejetant «la multiplication de ces exercices monarchiques visant à contourner le débat organisé dans ses formes constitutionnelles», les insoumis observaient que «les pistes du travail du président de la République sur une éventuelle réforme du référendum donnent la part belle aux propositions de la droite et de l’extrême droite».

En visite d’Etat à Berne (Suisse) mercredi 15 novembre, le président Emmanuel Macron a qualifié de «faute politique majeure» l’absence des chefs de parti du PS et des LR, avec qui il s’imaginait sans doute travailler. Ce sera peut-être pour la troisième «rencontre de Saint-Denis», si elle a lieu un jour.

Mise à jour : à 11 h 23, avec la déclaration de Fabien Roussel.