Le pronostic a plané sur toute la campagne, il s’est transformé en résultat acquis. Ce dimanche 9 juin au soir, l’extrême droite en France pèse près de 40 % des voix, selon les premiers sondages sortis des urnes. Pour ces élections européennes, la tête de liste du Rassemblement national, Jordan Bardella, écrase toute concurrence en obtenant 31,4 % des suffrages, auxquels s’ajoutent les 5,4 % de Marion Maréchal pour Reconquête.
C’est aussi la troisième fois d’affilée, après 2014 et 2020, que le parti frontiste arrive en tête de ce scrutin de liste à un tour, en dépit du très faible bilan de ses élus à Strasbourg et des soupçons de détournement de fonds européens qui pèsent sur certains d’entre eux. Outre leurs mantras habituels contre la «submersion migratoire» ou la «Commission de Bruxelles», le parti lepéniste a joué sur l’impopularité du pouvoir en présentant l’élection comme un référendum «pour» ou «contre» Emmanuel Macron. Et en annonçant qu’en cas de victoire ce dimanche soir, il réclamerait la dissolution de l’Assemblée nationale. Ce qu’il obtenu dans la soirée, puisque le président de la République a annoncé des élections législatives anticipées ces 30 juin et 7 juillet. En tout cas, l’extrême droite semble ainsi avoir profité, ou tout du moins n’avoir guère été pénalisée, par la forte mobilisation des électeurs français.
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Pour la liste de la majorité présidentielle, arrivée en deuxième position, la claque reçue est à la mesure de l’écart qui la sépare du RN. Valérie Hayer n’obtient que 14,6 % des voix, après une campagne sérieuse mais laborieuse, où elle aura rarement percé l’écran. L’eurodéputée sortante, en fin de campagne, a aussi dû s’accommoder de l’envahissante présence du Premier ministre, Gabriel Attal, qui a plus minoré la candidate qu’il n’a relancé sa campagne. Cinq ans plus tôt, avec un score de 22,42 %, la liste de Nathalie Loiseau avait terminé dans la roue du Rassemblement national et ses 23,34 %. Renaissance et ses alliés peuvent malgré tout souffler : ils ne sont finalement pas doublés par la liste PS-Place publique de Raphaël Glucksmann, croisement qui aurait donné à la défaite des airs d’humiliation.
Comme le laissaient deviner les sondages depuis plusieurs mois, le troisième homme du scrutin est donc bien l’essayiste social-démocrate. Au terme d’une campagne centrée sur la défense de l’Ukraine et de la démocratie en Europe, l’eurodéputé sortant Raphaël Glucksmann, avec 13,8 % des suffrages, fait plus que doubler son score de 2019 (6,19 %). Outre le gain de nouveaux élus au Parlement européen, le PS mettra en avant qu’il est la première force de gauche dans ce scrutin, abordé comme un moyen de rééquilibrer le rapport de force en vue de la présidentielle de 2027 entre les forces de l’ex-Nupes. Le plus dur commence désormais : après plusieurs mois de frictions, l’heure devrait être aux tentatives de retrouvailles. Pas gagné.
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La France insoumise finit, elle, en quatrième position avec 9,9 % des voix. La tête de liste Manon Aubry fait un peu mieux qu’il y a cinq ans, où elle avait obtenu 6,31 % des suffrages. Dès le début de la campagne, les insoumis ont présenté l’élection comme la première étape de l’après-Macron. Et même «le premier tour de la présidentielle de 2027», selon Jean-Luc Mélenchon. Conscients que les résultats du scrutin seraient perçus comme une mise à jour du rapport de force à gauche par les socialistes et écologistes, les insoumis ont tout fait pour mobiliser leur électorat de la présidentielle. Notamment en recentrant leur campagne sur la question palestinienne. Avec un succès mitigé.
Les écologistes, de leur côté, ne sont pas tirés d’affaire. Marie Toussaint récolte 5,5 % des voix. Un score qui ne les met pas à l’abri de la barre fatidique des 5 %, suivant la tournure des derniers dépouillements. Partie très tôt en campagne, dès le mois de décembre, l’eurodéputée a complètement raté son lancement, marqué par la désormais célèbre «booty therapy». Prise en tenaille entre Raphaël Glucksmann et Manon Aubry, la tête de liste écologiste a ensuite peiné à se faire entendre dans un contexte peu propice à la défense de l’environnement. Contrairement à 2019 où l’élection s’était déroulée en pleine vague de marches pour le climat – terminant troisième avec 13,48 %.
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Les Républicains, eux, limitent la casse. Pour sa deuxième campagne, François-Xavier Bellamy obtient 7,2 % des voix. Soit plus d’un point de moins qu’en 2019, où il avait totalisé 8,48 % des voix. Le professeur de philosophie versaillais a mené une campagne discrète autour de l’ambition de voir la France «reprendre son destin en main». Il s’est davantage fait remarquer pour ses réquisitoires contre les biais médiatiques de la campagne, à l’occasion du débat télévisé entre Gabriel Attal et Jordan Bardella ou de l’intervention surprise du Premier ministre lors d’un oral de Valérie Hayer à Radio France.
Pour ses premières européennes, Reconquête, dont la liste était menée par Marion Maréchal, récolte 5,5 % des voix. Un résultat presque inespéré pour le parti d’Eric Zemmour, qui devrait parvenir à installer des élus au Parlement européen. Pas sûr toutefois que ça soit suffisant pour que ses protagonistes cessent de se déchirer.
A gauche enfin, le communiste Léon Deffontaines échoue à se faire élire au Parlement européen. Avec 2,4 % des suffrages, la jeune tête de liste du PCF rate largement la barre des 5 % nécessaire pour envoyer des élus à Strasbourg et Bruxelles, malgré de bons débats télévisés et une aisance certaine dans les médias. Exactement comme son prédécesseur Ian Brossat cinq ans plus tôt.
Mise à jour le 10 juin avec les résultats définitifs