Et si LR donnait encore un peu plus de crédit au RN ? Le parti d’extrême droite a présenté ce mercredi 23 octobre en commission des Lois de l’Assemblée nationale sa proposition de rétablissement des peines planchers, qu’il défendra dans l’hémicycle lors de sa niche parlementaire du 31 octobre. Ces peines minimales pour les récidivistes avaient été instaurées en 2007 par Nicolas Sarkozy, avant d’être supprimées sous la présidence de François Hollande. Pour les LR, il s’agit d’une belle occasion de rétablir une idée de leur ancien chef mais aussi d’appliquer le programme établi cet été. Le groupe de Laurent Wauquiez avait ainsi présenté un pacte législatif dans lequel figurait la même proposition que celle du RN.
Mais vaut-elle pour autant le coup de voter un texte proposé par le parti d’extrême droite ? Pour Les Républicains, qui ont déjà coupé le cordon sanitaire avec le RN depuis plusieurs mois, «la ligne c’est qu’on les tape fort sur les sujets de désaccords, mais quand ils déposent un texte qu’on aurait pu écrire, on ne joue pas le théâtre», explicite un cadre LR auprès de Libération. Le parti de Laurent Wauquiez devrait donc soutenir la proposition du RN d’autant qu’aucune doctrine n’a officiellement été établie quant au fait de voter un texte des lepénistes. Une aubaine pour le parti à la flamme qui se retrouverait davantage légitimée en tant que formation politique avec qui travailler à l’Assemblée.
Billet
La situation n’est pas très différente du côté d’Horizons, la formation d’Edouard Philipe, qui avait déjà proposé de rétablir les peines planchers au printemps 2023. Le texte avait remué la majorité présidentielle de l’époque, qui s’était écharpée sur le sujet, avant de finir par le rejeter. Une bonne partie des macronistes refusant un texte trop à droite s’y était opposée, à l’instar du gouvernement.
Aujourd’hui, les philippistes n’ont pas défini de position claire à tenir face aux propositions venues du RN. Certains pourraient donc être tentés de renvoyer l’ascenseur au parti d’extrême droite dont les députés avaient voté en faveur de la proposition formulée par Horizons en 2023. Là encore, même en cas de rejet, la victoire serait belle pour le Rassemblement national, officiellement accepté comme un parti avec lequel des membres du «socle commun» peuvent collaborer, après avoir déjà été au cœur de tractations en coulisses avec le bloc central.
«Une mesure que l’on défend»
La niche parlementaire du RN mettra aussi la gauche à l’épreuve. Le 31 octobre, le parti de Marine Le Pen mettra également sur la table une proposition de loi pour abroger la réforme des retraites. De quoi susciter, là encore, de nombreuses interrogations dans les rangs du NFP qui milite pour supprimer le texte repoussant l’âge de départ en retraite à 64 ans. Si certains députés de gauche ont décidé de s’en tenir au principe qui prévalait jusque-là en s’opposant systématiquement aux textes venus de l’extrême droite, d’autres pourraient s’écarter de cette ligne.
Le député de Paris affilié LFI, Aymeric Caron, s’est, par exemple, prononcé en faveur d’un vote de l’abrogation proposée par le RN. «Il faudrait qu’on m’explique pourquoi on ne vote pas cette proposition de loi à partir du moment où elle porte une mesure que l’on défend, résumait l’ancien journaliste auprès de Libération. C’est une erreur de penser que le barrage républicain s’applique à ce vote-là. Et ça ne m’empêchera pas, ensuite, de poursuivre le combat que je mène contre les fachos depuis que j’ai 15 ans.» Des réflexions au sein de la gauche qui sont peut-être déjà une victoire pour le Rassemblement national dont les pièges sèment de plus en plus le doute dans l’hémicycle.