Menu
Libération
Assemblée nationale

Retraites, consentement, essence… ce que LFI défendra lors de sa «niche parlementaire»

Violences sexuellesdossier
Le parti insoumis, qui aura jeudi la main sur l’agenda de l’Assemblée, va prioriser sa proposition d’abrogation des réformes Borne et Touraine des retraites. Le texte va se heurter à l’obstruction du bloc central.
Des députés de la France insoumise, à l'Assemblée nationale le 31 octobre 2024. (Xose Bouzas/Hans Lucas. AFP)
par Jérémy Savignac Lafforgue
publié le 27 novembre 2024 à 16h16

La réforme des retraites de 2023, déclencheur du plus vaste mouvement social depuis les mobilisations contre la réforme de 2010, sera-t-elle abrogée ? La notion de consentement sera-t-elle intégrée au code pénal ? Les tarifs de l’énergie seront-ils temporairement gelés en France métropolitaine et en outre-mer ? Ce sont là quelques-unes des propositions que le groupe de la France insoumise (LFI) à l’Assemblée veut mettre au vote lors de sa niche parlementaire, ce jeudi 28 novembre. Au total, dix propositions de loi, principalement d’ordre économique et social, sont inscrites à l’ordre du jour et devraient animer les débats au sein de l’hémicycle.

Créé par la réforme constitutionnelle de 1995 et renforcé sous la présidence de Nicolas Sarkozy, le dispositif des «niches» offre, une journée par mois, la possibilité à un groupe minoritaire ou d’opposition à l’Assemblée de fixer l’ordre du jour, et ainsi d’y faire figurer ses propres textes. La fenêtre court de 9 heures à minuit, heure à laquelle s’interrompent les débats.

Forcer la main aux socialistes

Inscrite en premier à l’ordre du jour et portée par le député du Nord Ugo Bernalicis, la proposition d’abrogation des réformes des retraites Borne (2023) et Touraine (2014) est la pièce de résistance de la niche LFI. Entrée en vigueur le 1er septembre 2023, la réforme Borne relève l’âge de départ à la retraite à 64 ans. Le texte de LFI propose de le ramener à 62 ans, ainsi que de revenir sur le passage de 42 à 43 ans de cotisation pour toucher une retraite à taux plein, introduit par la réforme Touraine en 2014.

Cette nouvelle tentative de suppression de la réforme intervient après l’échec de la proposition d’abrogation portée par le RN lors de sa propre niche, le 31 octobre. Largement vidé de sa substance en commission, le texte avait ensuite été rejeté par une majorité de députés, la gauche ayant refusé de joindre ses voix à celles du parti d’extrême droite.

Avec leur proposition, les insoumis entendent faire d’une pierre deux coups : supprimer une réforme qu’ils jugent «injuste» et forcer par la même occasion la main aux socialistes, à l’origine de la réforme Touraine, menée sous le quinquennat de François Hollande. A l’exception de ce dernier, les députés du parti de la rose ont fait savoir qu’ils voteraient l’abrogation, quitte à sacrifier une de leurs réformes. L’initiative semble en phase avec l’opinion publique : selon un sondage Toluna-Harris Interactive, publié le 19 novembre et commandé par l’état-major de LFI, près de 70 % des Français souhaitent revenir à un âge légal de départ à la retraite fixé à 62 ans. Toutefois, même si l’Assemblée adoptait le texte insoumis, celui-ci n’aurait presque aucune chance de prospérer : le texte serait ensuite soumis au Sénat, et rejeté par la majorité de droite de la chambre haute.

Au-delà de l’abrogation, neuf textes supplémentaires figurent au programme de la séance parlementaire du jeudi 28 novembre. L’un d’entre eux vise à l’intégration explicite de la notion de consentement dans la définition pénale de l’agression sexuelle et du viol, une initiative qui sera examinée en deuxième position. Cette démarche s’inscrit dans un contexte sensible, notamment marqué par le procès des viols de Mazan. Bien que rejeté il y a quelques jours en commission des lois, le texte sera tout de même défendu jeudi en séance par sa rapporteure, Sarah Legrain, députée de Paris.

Les travaux de l’A69 en Occitanie

Face à la flambée des prix de l’énergie, la députée de Seine-Maritime, Alma Dufour, portera une mesure validée en commission des finances, qui vise à encadrer strictement les tarifs énergétiques en métropole et en outre-mer. Un blocage temporaire du prix de l’essence est aussi prescrit dans cette proposition de loi. Sera aussi proposé un moratoire sur les projets routiers et autoroutiers, avec en ligne de mire les travaux de l’A69 en région Occitanie. Ainsi que l’encadrement des rémunérations maximales dans les entreprises, la reconnaissance de la pénibilité des métiers féminisés, une refonte du financement public des établissements privés, ou encore la régularisation des professionnels médicaux détenteurs de diplômes hors Union européenne.

Mais avec l’interruption des débats à minuit, la plupart de ces textes ne devraient pas avoir le temps d’être examinés. D’autant moins que les députés du «socle commun» – les groupes qui soutiennent le Premier ministre Michel Barnier – sont résolus à obstruer les débats autour du premier texte, proposant l’abrogation de la réforme des retraites. Avec près de 1 000 amendements portant sur ce texte, l’objectif est d’étirer les discussions pour empêcher tout vote avant la fin des débats.