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RPR, UMP, Les Républicains, la Droite républicaine : toutes les fois où la droite française a trouvé un nouveau nom

Laurent Wauquiez a annoncé mercredi que le groupe «Les Républicains» à l’Assemblée nationale allait désormais s’appeler «la Droite républicaine». Un troisième changement en à peine douze ans et qui semble anticiper le changement de nom du parti de la droite.
Laurent Wauquiez annonce le 10 juillet 2024 la création de «La Droite républicaine» devant l'Assemblée. (Denis Allard/Libération)
par Noa Jacquet
publié le 11 juillet 2024 à 15h07

Une fois de plus dans son histoire, la droite française est en passe de changer de nom : à l’issue d’une réunion mercredi 10 juillet, le groupe Les Républicains, présidé par un Laurent Wauquiez de retour à l’Assemblée nationale, a décidé qu’il allait désormais s’appeler «la Droite républicaine». Fragilisés par la dissolution et les drames internes causés par la trahison d’Eric Ciotti, parti toper avec le Rassemblement national pour les législatives alors qu’il était président du parti, et qui a, de son côté, crée son propre groupe à l’Assemblée – A droite ! –, Les Républicains, héritiers de la droite conservatrice et de la tradition gaulliste, souhaitent donc pouvoir se distinguer, et faire peau neuve avec un nouveau nom. Une stratégie utilisée pas moins de six fois au cours de leur histoire, du Rassemblement du peuple Français (RPF) du général de Gaulle jusqu’à aujourd’hui. Retour sur l’histoire d’une terminologie aux revirements récurrents.

Le RPF, rassembler la droite après la guerre

1947. La droite, fragilisée par les années vichystes, est quasiment absente de la vie politique : trois grands partis dominent en France, et aucun ne se rattache à elle. Néanmoins, de Gaulle, héros de la guerre et de la Résistance, proche de cet électorat, explose en popularité à la Libération. Et fort de cette influence, fonde le Rassemblement du peuple Français (RPF). Plus qu’un parti, le «Rassemblement» correspond à «un projet politique qui voyait en Charles de Gaulle le chef d’une nouvelle union nationale n’excluant que les communistes», explique Gilles Richard dans l’Histoire des droites en France. Mais la RPF ne prend pas, et s’effondre en même temps que son chef commence sa traversée du désert.

L’UNR, la création d’une famille gaulliste

En 1958, de Gaulle revient en homme providentiel en pleine guerre d’Algérie. Les forces de droite comptent bien sur cet événement, en même temps que sur l’entrée dans la Ve République pour peser de nouveau. C’est la création de l’Union pour la nouvelle République (UNR), un levier pour créer une «machine électorale gaulliste», sans lien direct avec son chef, analyse toujours Gilles Richard. Cela permet à de Gaulle de créer une famille politique gaulliste à droite, tout en conservant son image «d’arbitre “au dessus des partis”, au nom de l’intérêt supérieur de la nation». La terminologie de l’UNR revendique par ailleurs la paternité de la Ve République et la place principalement à droite.

L’UDR, une force pour Pompidou

L’Union des démocrates pour la République (UDR) naît d’un constat : aux législatives, la majorité gaulliste l’a emporté, mais de justesse. L’UNR est associée à un chef vieillissant, et si la droite veut survivre, il fa falloir mettre en avant l’aile jeune qui la compose. D’où la nécessité de redynamiser le gaullisme sous l’impulsion d’un nouveau Premier ministre, Georges Pompidou, et de cadres du parti plus jeunes, prêts à investir l’ensemble des territoires en France.

Le RPR, ouvrir la page Chirac

Le Rassemblement pour la République (RPR) est l’idée de Jacques Chirac, ancien jeune loup de l’UDR et Premier ministre de Valéry Giscard d’Estaing, qui vient tout juste de claquer la porte de Matignon, pour rénover la tradition gaulliste et faire opposition aux forces de droite non-gaullistes du président centriste. Dans l’objectif de revenir à «un vaste mouvement populaire» fondé sur les valeurs essentielles du gaullisme, selon les mots de Chirac, l’UDR se dissout en 1976 pour devenir le RPR. Le parti réunit les partisans d’une nouvelle génération de gaullistes, ouverts à la modernisation des valeurs et à un libéralisme économique plus affirmé. Le RPR restera la terminologie la plus durable pour un parti de droite sous la Ve République.

L’UMP, gagner contre le FN... puis servir Sarkozy

Le 21 avril 2002 est un coup de tonnerre en France : le Front national de Jean-Marie Le Pen est pour la première fois (et pas la dernière) au second tour de l’élection présidentielle. Aux grands problèmes les grands moyens : trois jours après les résultats d’un premier tour que personne n’attendait, Jacques Chirac fonde l’Union pour la majorité présidentielle (UMP), «un grand parti de droite et de centre-droit», qui réunit toutes les composantes de cette famille politique (RPR, Démocratie libérale, Mouvement des réformateurs...), à l’exception de François Bayrou qui conserve la vieille boutique UDF pour la transformer en Mouvement démocrate (Modem) en 2007. Après la victoire de Jacques Chirac, la «majorité présidentielle» va être remplacée par «mouvement populaire» et s’atteler très vite à porter Nicolas Sarkozy au pouvoir.

Les Républicains, marque au rabais

2012. La gauche est de retour au pouvoir et la droite retourne dans l’opposition, une première depuis 2002. Fragilisée par les casseroles de Nicolas Sarkozy, embourbé dans l’affaire Bygmalion, le parti décide en 2015 d’opérer un changement de nom et de devenir «Les Républicains» : en plus d’une nouvelle terminologie, le parti se dote d’un bureau politique plus conséquent, capable de faire face aux problèmes internes. Portée par Nicolas Sarkozy, la nouvelle enseigne sera finalement celle de François Fillon à la présidentielle de 2017, puis de Valérie Pécresse cinq ans plus tard. Deux échecs au premier tour.

La Droite Républicaine, siamo tutti anti Ciotti

Serait-ce là le nouveau nom du parti ? A minima celui du nouveau groupe à l’Assemblée nationale. Après la trahison d’Eric Ciotti et le départ de son quarteron en alliance avec le Rassemblement national, Les Républicains ont fait savoir leur souhait de rompre avec leur (ex-)président. Comme l’avaient laissé entendre certains membres du parti comme le patron des sénateurs, Bruno Retailleau, ou le député du Bas-Rhin, Patrick Hetzel, cette rupture serait certainement consommée par un changement de nom à l’Assemblée nationale. Nouveau président du groupe, Laurent Wauquiez a donc opté pour La Droite Républicaine, en opposition au «A droite !» d’Eric Ciotti et ses quelques députés. Sera-t-il aussi le nom d’un nouveau parti construit sur les cendres des Républicains ? Pour cela, il faudra attendre le prochain congrès.