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Libération
Reconduction

Sébastien Lecornu, insubmersible au ministère des Armées

Le fidèle macroniste venu de LR garde son poste au sein du gouvernement de Michel Barnier, un des rares portefeuilles stables.
Sébastien Lecornu à l'Elysée le 16 juillet. (Maxime Gruss/Hans Lucas via AFP)
publié le 21 septembre 2024 à 20h45

Et il repart pour un tour. Sébastien Lecornu, ancien membre de LR et collaborateur apprécié d’Emmanuel Macron, installé depuis deux ans et trois mois, est un des rares à garder son ministère. Un poste plutôt confortable et à l’abri des coups, malgré une situation géostratégique en surchauffe, notamment au Moyen-Orient. Au Parlement, la défense de la nation est un sujet par nature consensuelle. Le Président étant le chef des Armées et conduisant les opérations militaires, le ministre des Armées n’est qu’un exécutant qui ne peut pas être tenu responsable des décisions importantes. Et contrairement à la Santé ou à l’Education, ses troupes ne sont pas du genre remuantes : par définition, les militaires obéissent, il n’y a pas de syndicats, et près des trois quarts des personnels sont en CDD.

Avec l’adoption d’une nouvelle loi de programmation militaire (LPM), le 13 juillet 2023, qui a presque doublé les crédits accordés aux armées, avec la somme astronomique de 413 milliards d’euros prévue sur sept ans, le milieu feutré de la défense nationale n’a pas eu à se plaindre de son plus jeune ministre depuis 1792, installé à l’hôtel de Brienne depuis mai 2022. Bien que les gouvernements précédents n’aient jamais mis en pratique «l’économie de guerre» annoncée au clairon depuis 2022, les milliards programmés pour l’équipement ont également ravi les industriels.

Après qu’il a réussi à imposer à Nexter l’augmentation de la cadence sur la production des canons Caesar, dont 78 unités devraient être produites en 2024 à destination de l’Ukraine, que Thales a pu fournir à Kyiv deux radars GM-200, que MBDA voit ses missiles promis à un bel avenir dans le ciel ukrainien, voire russe, et que Delair s’est appliqué à fabriquer des drones kamikazes made in France, l’hypothèse d’une arrivée du Rassemblement national au pouvoir avait donné des sueurs froides aux entreprises. Le maintien de Lecornu à son poste devrait assurer le suivi des contrats. En espérant qu’il fasse mieux encore, puisque l’aide militaire française à l’Ukraine est encore terriblement maigre - malgré le triplement de la fabrication d’obus depuis 2022, la production annuelle couvrirait à peine les besoins des forces ukrainiennes pendant quelques jours.

Pour ne pas décevoir les fortes attentes de ses troupes, Sébastien Lecornu devrait profiter de ce nouveau départ pour passer à la vitesse supérieure dans le délicat dossier de la lutte contre le harcèlement et les violences sexuelles, un chantier qui peine à démarrer malgré les déclarations martiales. Il lui faudra aussi gérer la diminution drastique de la présence militaire française au Sahel, cause d’une cuisante humiliation, et faire rentrer à la maison les quatre agents de la DGSE retenus depuis dix mois au Burkina Faso. Et continuer à améliorer les conditions de vie des militaires, notamment les salaires, tout en ne ratant aucun des virages technologiques cruciaux pour les armées, notamment dans les domaines du cyber, de l’intelligence artificielle, du spatial et des drones.