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Chez Pol

Sébastien Lecornu renonce au 49-3 : l’ensemble de la gauche y décèle un «mariage avec le RN»

Des socialistes aux insoumis, l’opposition de gauche n’a pas été convaincue par la promesse du Premier ministre, vendredi 3 octobre. A la notable exception de Fabien Roussel, qui veut «laisser le Parlement faire son boulot».

Le socialiste Boris Vallaud, le 8 septembre à l'Assemblée. (Tom Nicholson/REUTERS)
ParSébastien Tronche
Journaliste politique
Antoine Rondel
chef adjoint du service Actu
Publié le 03/10/2025 à 10h38

Juste avant de recevoir les socialistes à Matignon pour une réunion de la dernière chance, Sébastien Lecornu a sorti sa carte joker : il a annoncé renoncer à l’arme atomique du 49.3 sur le Budget, comme l’avaient demandé les roses. Si le camp présidentiel a aussitôt salué cet engagement primo-ministériel concrétisant sa promesse de «rupture», la gauche n’a pas vraiment sauté au plafond. «Le Premier ministre appelle au compromis mais n’en propose aucun au moment où on va le rencontrer», a réagi sur France info Boris Vallaud, le patron des députés PS, estimant avoir «besoin de précisions» supplémentaires avant de se réjouir. Car, souligne-t-il, d’autres outils parlementaires peuvent permettre à l’exécutif de cornaquer les oppositions.

Un scepticisme partagé parmi les autres composantes de la gauche à l’Assemblée. «Il n’avait guère le choix en réalité.. Toute utilisation du 49.3 entraînait immédiatement une motion de censure et donc sa chute», a répliqué l’ex-LFI Alexis Corbière, toujours prêt à renverser le gouvernement. L’écolo Benjamin Lucas appelle à se méfier de ce «leurre» destiné à «gagner du temps pour maintenir la politique de Macron au pouvoir».

Lecornu «préfère les magouilles RN & LR »

Côté LFI, on voit d’ailleurs dans cet acte de privation un signal vers le RN. «Pas d’illusion, avertit ainsi le député Eric Coquerel. L’annonce de la non utilisation du 49-3, après deux jours où on a vu en grand une alliance Macronistes/RN à l’assemblée à l’occasion des élections pour le bureau et les commissions, signifie que celle-ci va se poursuivre pendant le budget.» Sa collègue Gabrielle Cathala lui emboîte le pas : «Il préfère les magouilles avec RN & LR en commission mixte paritaire.» Chose rare, l’analyse insoumise est partagée par Rémi Branco, proche de Boris Vallaud: «La rupture de méthode a de grands airs de mariage avec le RN.»

Principale éminence de gauche à s’éloigner de la partition : le patron du Parti communiste Fabien Roussel, qui a confié qu’il trouverait «raide» de censurer d’emblée un gouvernement qui renonce à utiliser l’article 49.3 de la Constitution alors que c’est une proposition «défendue» par la gauche et qui «rend la balle» au Parlement. «Il faut sortir de l’impasse, il faut avancer. Moi, je suis plus dans la culture du dialogue et de laisser le Parlement faire son boulot», a réagi le dirigeant communiste sur BFMTV/RMC après l’annonce de Sébastien Lecornu de renoncer à utiliser l’article 49.3 de la Constitution.

L’ex-député du Nord prévient toutefois, avant son rendez-vous à Matignon en fin de matinée, qu’il s’assurera auprès du Premier ministre «qu’il n’y ait pas d’arnaques» derrière cette annonce, qui permettraient au gouvernement d’utiliser d’autres procédures pour forcer la main du Parlement.