Comment vont nos maires ? Pas si mal, si l’on en croit une étude inédite menée par des chercheurs montpelliérains, avec l’appui de l’association des maires ruraux de France (AMRF). Lors de ce travail de terrain commencé en février, et dont les résultats ont été révélés ce vendredi 30 août, plus de 1729 élus locaux ont répondu à un questionnaire pointu sur leur santé mentale. Les maires des villes de plus de 10 000 habitants ont été écartés du panel, car trop facilement reconnaissables dans le cadre d’une enquête exigeant un strict anonymat. «Mais ces élus à la tête de grandes villes ne représentent que 2,5 % des maires», précise l’enseignant-chercheur Olivier Torrès, initiateur de cette enquête avec Mathieu Le Moal, tous deux à l’université de Montpellier. «Ce travail nous a permis de collecter 300 000 données dans un champ d’investigation resté vierge jusqu’ici», ajoute Olivier Torrès.
Principal enseignement des témoignages recueillis : près de 70 % des maires se disent satisfaits en tant qu’élus, une proportion qui contraste avec la perception généralement partagée à l’égard de cette fonction. «Exercer ce mandat reste une aventure exceptionnelle sur le plan humain. On se sent utile, on œuvre pour les autres, on a le pouvoir de rendre des projets possibles», résume Michel Fournier, président de l’AMRF et maire du village Les Voivres (Vosges).
«Ce sont les jeunes qui se découragent le plus vite»
Mais le tableau s’assombrit avec le second chiffre clé de l’étude : plus de 31 % des élus locaux font face à un début d’épuisement. Parmi eux, 3,5 % présentent même un risque élevé. «Cet épuisement sévère concerne environ 1200 maires, calcule Olivier Torrès. On constate un risque de burn-out particulièrement marqué parmi les femmes élues et les maires isolés. Il faut rappeler que les élus ont trois vies en une : leur vie personnelle, professionnelle et publique. C’est une donnée hyperspécifique, qui inscrit leur quotidien entre un sacerdoce républicain et un sacrifice personnel.» Michel Fournier reconnaît que le sentiment d’impuissance et le manque de reconnaissance peuvent peser. «Il faut avoir le cuir tanné pour résister, estime-t-il. D’ailleurs, ce sont les jeunes qui se découragent le plus vite.»
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Autre enseignement de cette étude : les agressions et menaces, dont les médias se font régulièrement l’écho, ne figurent qu’au huitième rang des événements potentiellement les plus stressants cités par les maires. Les premières sources d’angoisse relèvent plutôt de la bureaucratie : la complexité et la lourdeur administratives, la charge de travail et le manque de temps, les difficultés liées aux subventions. A l’inverse, la réussite d’un projet municipal apparaît comme l’élément le plus satisfaisant pour un maire dans sa fonction d’élu, suivie par les cérémonies et célébrations.
Un dispositif de prévention contre le burn-out des maires va être mis en place d’ici la fin de l’année par Olivier Torrès et l’observatoire Amarok, une structure associative à but non lucratif qu’il a créé voilà plusieurs années, et jusqu’ici dédié à la santé des entrepreneurs.