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Polémique

Vendeurs à la sauvette : une affiche de la préfecture de police de Paris fait enrager la fachosphère

Un visuel, publié mercredi 6 août, met en garde les touristes contre l’achat de souvenirs dans les rues de la capitale. Problème pour l’extrême droite : le vendeur est blanc.
Des répliques de la tour Eiffel, à Montmartre. (Alessandro Saffo/SIME)
publié le 7 août 2025 à 18h15

Enfin de quoi s’occuper pendant l’été ! Avec la publication d’une affiche de prévention contre l’achat de souvenirs à la sauvette par la préfecture de police de Paris, mercredi 6 août, les internautes d’extrême droite se sont trouvé un nouveau sujet de polémique. Diffusé sur X, le visuel représente deux hommes devant la tour Eiffel : l’un, censé représenter un touriste, porte un tee-shirt «I love Paris», l’autre tente de lui vendre illégalement des reproductions miniatures du monument. La situation est certes courante aux abords de la Dame de fer, mais le vendeur, sur l’affiche, est un homme blanc. Ce qui n’est pas représentatif de la réalité selon de nombreux utilisateurs du réseau social détenu par Elon Musk, où pullulent des publications souvent décomplexées aux relents racistes, complotistes, misogynes ou homophobes.

«Jean-Edouard le vendeur à la sauvette alors que 100 % sont des Africains. De qui [se moque la] préfecture de Police de Paris ?» a ainsi ironisé le militant identitaire, condamné pour harcèlement en ligne, Damien Rieu. «C’est quoi cette connerie encore ? Les vendeurs à la sauvette du Champ-de-Mars sont à 95 % noirs», a aussi réagi l’ancienne Femen ralliée à l’extrême droite, Marguerite Stern. Beaucoup d’autres internautes ont quant à eux utilisé l’une des expressions favorites de la fachosphère : «Tout le monde sait.» Une formule couramment employée pour sous-entendre que les faits divers seraient toujours causés par les mêmes : les personnes d’origine étrangère.

«Ce travail répond à des logiques de subsistance»

Forts de ce genre de raccourcis, habituels sur le réseau social où les publications se limitent la plupart du temps à quelques centaines de caractères, les internautes ne se sont pas attardés sur le message prévention qui accompagne l’affiche. En achetant des objets aux vendeurs à la sauvette «vous alimentez des réseaux clandestins et illégaux», précise ainsi la préfecture de police. Ses agents mènent d’ailleurs régulièrement des coups de filet pour interpeller des vendeurs dans le but de mettre à mal les organisations pour lesquelles ils travaillent. De la vente de souvenirs, à celle de roses ou de cigarettes de contrebande, les personnes en première ligne ne sont en effet que la face visible de réseaux clandestins.

Ces derniers exploitent et offrent un maigre revenu à des personnes effectivement issues de l’immigration pour lesquelles la vente à la sauvette représente le seul moyen de subsistance. «Les vendeurs à la sauvette sont quasi exclusivement des hommes isolés, arrivés récemment sur le territoire français et sans-papiers […]. Ces hommes n’ont pas de capital social ni de relations et aucun moyen de s’insérer dans le monde du travail, même dans les milieux de la restauration qui emploient plus facilement des sans-papiers. Ce travail répond pour eux à des logiques de subsistance et est souvent perçu comme provisoire», expliquait ainsi le sociologue Louis Braverman au micro de France Culture, en mai 2024. La fachosphère pourrait donc se retrouver prise à son propre piège en mettant la lumière sur l’exploitation clandestine de la pauvreté et de la main-d’œuvre immigrée.