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Vitrolles, cinq ans de labo du Front national

Le photographe Patrick Gherdoussi a couvert les années Mégret de la ville des Bouches-du-Rhône de 1997 à 2002. Le couple frontiste y a appliqué les thèmes de prédilection du FN. Retour en image sur ces cinq années.
En mars 1997, alors que le FN s’est installé à la mairie, un militant de Ras l’Front est contrôlé par la police parce qu’il lisait le journal éponyme de son association. Par protestation, des militants associatifs vitrollais se sont réunis devant la mairie avec cette publication en main. De nombreuses associations ont joué un rôle crucial face aux dérives de la mairie FN durant le mandat de Catherine Mégret. (Patrick Gherdoussi/Divergence)
publié le 15 mai 2022 à 12h02

Nous sommes en 1997. J’ai 23 ans. J’ai grandi à Vitrolles (Bouches-du-Rhône), une ville nouvelle construite entre un village provençal et une zone commerciale et industrielle. Je suis correspondant de presse pour la Provence, couvrant la vie associative de la ville et les matchs de foot amateur pour les pages locales du journal. J’apprends le métier de journaliste et de photographe sur le tas. Depuis 1989 et son score aux cantonales, le Front national sait qu’il peut conquérir cette ville du sud.

En 1995, Marignane, Orange et Toulon basculent à la suite de triangulaires. Pas Vitrolles malgré la présence du numéro 2 du FN, Bruno Mégret parachuté depuis 1993. L’annulation de l’élection en 1996 provoque un nouveau vote. L’interdiction faite à Bruno Mégret de se présenter pendant un an à des élections le pousse à présenter sa femme Catherine. Alors le FN met les moyens sur cette unique élection : arrive tout un tas de militants, mélange d’identitaires, d’anciens militaires et vieux militants FN. Cette fois, Catherine Mégret remporte la ville : Vitrolles sera «le laboratoire» du FN.

La politique frontiste s’appliquera sur ses thèmes favoris. Les faits les plus marquants ont touché la culture. Le murage du Sous-Marin (salle de concert Punk Rock Alternative) ou le licenciement de Régine Juin, la directrice du cinéma les Lumières. Elle est licenciée pour avoir programmé les courts-métrages de Philippe Faucon parlant de l’homosexualité : «Si on tolère ça, on tolère la pédophilie» lui jette l’adjointe à la culture de Catherine Mégret. Des rues sont débaptisées. Les Associations voient leurs subventions municipales fondre, la police municipale prend une importance démesurée. La préférence nationale s’applique avec une prime de naissance. On demande une carte d’identité pour rentrer dans les rares maisons de quartier encore ouvertes. La culture FN prend sa place entre tambourin, troubadour et festival de rock identitaire français ou sont réunis des néonazis de toute la France. Au centre de la ville, les quartiers populaires sont abandonnés. La ville est fracturée. Le FN restera cinq ans.

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