Comme dans neuf autres agglomérations françaises, la zone à faibles émissions (ZFE) de la métropole de Montpellier a vu le jour le 1er janvier 2023. Michaël Delafosse, maire et président de la collectivité, n’a pas l’intention de suspendre le dispositif critiqué sur place par deux députés de La France insoumise. A condition que l’Etat s’y investisse pleinement.
Les voitures classées Crit’Air 5 – datant de 1997 – sont désormais exclues de plusieurs communes de votre métropole. Quelles seront les prochaines étapes d’installation de votre ZFE ?
Chaque année, plus de 40 000 personnes meurent des causes de la pollution atmosphérique. A Montpellier, qui plus est ville de la médecine [la faculté de Médecine de la ville a plus de 800 ans, ndlr], tous les chercheurs en parlent. Nous avons donc délibéré sur un calendrier progressif, prévu par le législateur dans le cadre de la loi climat-résilience. Les véhicules Crit’Air 4 seront interdits au 1er janvier 2024, et les Crit’Air 3 le 1er janvier 2025. J’ai indiqué que l’interdiction des voitures diesel arriverait à l’horizon 2028. C’est un calendrier de transition : il ne faut pas se précipiter, et laisser aux administrés le temps de s’organiser. Certaines règles d’adaptation ont d’ailleurs été édictées : les «petits rouleurs», ceux qui effectuent moins de 8 000 kilomètres par an, pourront tout de même rentrer dans la métropole de Montpellier.
La protestation grandit contre ce dispositif : il y a deux jours, deux députés insoumis demandaient sa suspension, craignant que la ZFE n’aggrave les inégalités sociales. Que leur répondez-vous ?
Je leur réponds que l’on ne peut pas prôner la planification écologique, puis finalement ne rien faire. Qui est principalement atteint du cancer ? Les gens les plus pauvres. Dans beaucoup de métropoles, les logements sociaux sont près des grandes infrastructures routières qui polluent. Les riches, eux, se mettent toujours à l’abri. A noter tout de même que ceux qui ont constamment été hostiles aux zones à faibles émissions sont les partisans d’Eric Zemmour et du Rassemblement national. Je pense surtout que les insoumis ont vu l’occasion de distiller «le bruit et la fureur». La métropole de Montpellier est la seule qui mettra en place au 21 décembre 2023 la gratuité des transports. Nous avons également investi 1 milliard d’euros pour promouvoir les déplacements alternatifs. Voici donc la dimension sociale que nous apportons aux ZFE. Mais ça, les insoumis ne veulent pas le voir. A Montpellier, ils ont d’ailleurs refusé de soutenir ces mesures.
Le dispositif semble effrayer les collectivités, qui redoutent la colère de leurs administrés. Même le président écologiste de la métropole de Lyon, Bruno Bernard, recule sur le calendrier initialement prévu…
Bruno Bernard ne rétropédale pas. Il a réajusté son calendrier qui, au départ, était peut-être trop serré. Les nouvelles échéances sont d’ailleurs similaires à celles de Montpellier. Il ne perd pas de vue l’objectif, mais l’Etat devra aider.
Plusieurs élus locaux déplorent le manque d’accompagnement de l’Etat dans la mise en place des ZFE. Partagez-vous ce constat ?
Tous les élus prennent leur part, et s’engagent courageusement. L’Etat, quant à lui, est volontariste a minima. J’aimerais que le gouvernement soit plus cohérent dans sa parole publique : sur les radars homologués, par exemple, il ne tient pas ses engagements en décalant constamment leur date de disponibilité. Avec France urbaine [l’association des grandes villes françaises, ndlr], nous souhaiterions également qu’un dispositif fiscal permettant d’accompagner les changements de véhicules soit adopté dans la prochaine loi de finance. Il y a là l’occasion de faire d’une pierre deux coups : améliorer la qualité de l’air et soutenir l’industrie automobile. Pour préserver 2 millions et demi d’emplois.