Menu
Libération
Combines

Primaire LR : les parrainages au cœur de manœuvres anti-NKM

Quelle que soit sa sensibilité politique, tout élu peut, en principe, parrainer un candidat. Mais après avoir approuvé cette règle, les sarkozystes la contestent.
Luc Chatel, Nathalie Kosciusko-Morizet et Bruno Le maire à l'Assemblée, en 2012. (Photo Thomas Samson. AFP)
publié le 17 mars 2016 à 10h23

A droite, l'affaire paraissait entendue, tout le monde avait juré de jouer loyalement le jeu de la primaire. Même les sarkozystes, pourtant notoirement hostiles à cette innovation qui divise inutilement là où il aurait été si facile de se ranger sans barguigner derrière le vrai leader naturel. Cédant aux caprices des Fillon, Juppé et autre Le Maire, l'ancien chef de l'Etat a fini par accepter le principe de cette compétition, faisant sienne la célèbre formule de Cocteau : «Puisque ces mystères nous dépassent, feignons d'en être l'organisateur.»

Mais le naturel revient parfois au galop. Ainsi, mardi soir, lors de la réunion du comité d’organisation de la primaire présidée par Thierry Solère, le représentant de Sarkozy, Luc Chatel, a remis en cause les règles de parrainage pourtant longuement négociées l’an dernier par les représentants des principaux candidats, sous la haute autorité indépendante de la juriste Anne Levade. Selon Chatel, il conviendrait de corriger de toute urgence ces règles afin que seuls les élus encartés au parti Les Républicains puissent parrainer les candidats à la primaire. Pour tous les responsables de LR présents à la réunion de mardi soir, cette initiative de Chatel vise de toute évidence à compliquer la candidature de l’insolente Nathalie Kosciusko-Morizet. Marginale dans sa propre famille, l’ex-ministre de l’Ecologie pourrait devoir aller chercher ses futurs parrains ou marraines en dehors de son propre parti, du côté des centristes ou, pourquoi pas, d’élus de gauche qui pourraient être tentés – c’est la mode – de dépasser les «vieux clivages».

Parrainages en dehors de LR ? «Tout de même curieux»

La charte de la primaire de la droite et du centre est pourtant très claire : pour que sa candidature soit validée, le prétendant issu du parti LR ne doit pas seulement disposer des signatures de 2 500 militants LR. Il doit aussi recueillir celle «d'au moins 250 élus habilités à présenter un candidat en vue de l'élection présidentielle». Parmi ces élus, il est exigé qu'il y ait au moins 20 parlementaires. Comme le souligne Thierry Solère, les rédacteurs de la charte ont voulu, avec cette règle, se donner les moyens de sélectionner de vrais présidentiables et d'écarter les candidatures fantaisistes. C'est pourquoi ils ont retenu les mêmes conditions que celles qui sont posées aux candidats à l'élection présidentielle. Pour pouvoir se présenter à la magistrature suprême, il faut en effet être capable de présenter au Conseil constitutionnel une liste de 500 parrainages d'élus : maires, parlementaires, députés européens, conseillers départementaux et régionaux. Le nombre a donc juste été divisé par deux pour la primaire de LR, mais le principe est exactement le même.

«C'est vrai, notre charte de la primaire n'interdit pas explicitement les parrainages d'autres partis. Mais c'est tout de même curieux. Pour nous il est évident que cela devrait être réservé aux seuls élus LR», explique-t-on dans l'entourage de Nicolas Sarkozy. Le sujet sera vraisemblablement abordé la semaine prochaine en bureau politique. Anticipant de fortes résistances des autres candidats, les lieutenants de l'ex-chef de l'Etat estiment qu'il faudrait, a minima, exiger que les parrains proclament, comme les électeurs de la primaire, leur «attachement aux valeurs de la droite et du centre» et leur souhait d'une «alternance» en 2017.

Des centristes dans l’incompréhension

Cette dernière exigence pourrait faire consensus. Même si elle s'écarte de l'esprit de la charte de la primaire. Il est en revanche certain que les juppéistes, les fillonistes et les amis de NKM ou de Le Maire refuseront que le soutien aux candidats soit réservé aux seuls élus LR. Ne serait-ce que parce que de nombreux parlementaires centristes ont l'intention de parrainer leur favori. Le député UDI Michel Piron est de ceux-ci. «Je suis tout à fait décidé à parrainer Juppé, je ne comprendrais pas qu'on veuille m'en empêcher», confie-t-il à Libération.

Peut-on imaginer que des élus de gauche s’engagent pour un candidat à la primaire de la droite ? Dans le camp de NKM, on s’étonne que les sarkozystes ne puissent le concevoir. N’est-ce pas Sarkozy lui-même qui fit entrer des hommes de «gauche» dans un gouvernement de droite ? En cette fin de quinquennat, il n’est pas totalement exclu que quelques rares élus radicaux, socialistes ou écologistes, sentant venir l’alternance, puissent se laisser séduire par l’offre politique d’un Juppé ou d’une NKM. Ce ne serait en tout cas pas plus choquant que les débauchages post-électoraux de 2007, quand Bernard Kouchner et Jean-Marie Bockel rejoignaient le gouvernement Fillon.