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Libération
Les agitateurs de libé

Benoît Hamon, le gars de Brest

L'écrivain Caryl Férey a assisté à la rencontre de Benoît Hamon avec la rédaction de Libération.
Benoit Hamon à la rédaction de Libération, jeudi 5 janvier 2017. (Photo Ivan Guilbert. Cosmos pour Libération)
par Caryl Ferey, écrivain
publié le 6 janvier 2017 à 18h49

C’est le genre d’histoire qui m’amuse… Il y a cinq ans, lors d’un apéro chez des amis, j’étais en pleine diatribe bretonne (je ne sais plus ce que je racontais) lorsqu’un couple également invité arriva; on se dit bonjour, puis je finis mon envolée en leur compagnie. Le nouvel arrivant avouant être brestois (ces gars-là sont les pires soiffards de l’Hexagone), nous ne fûmes pas longs à rire en racontant mille anecdotes finistériennes. Enfin, au bout de dix minutes, notre hôte m’avoua que Benoît (c’était le prénom du type qui venait d’arriver) était Benoît Hamon. Croyant à la blague, je lui dis

«Tiens, c’est vrai, tu as la même gueule mal rasée !»

N’ayant pas de télé depuis vingt ans, je connaissais le visage de Benoît Hamon via les caricatures de Charlie Hebdo, aussi en remis-je une couche.

«Heu… Non, mais c’est le vrai Benoît Hamon»

rétorqua bientôt notre hôte, un peu gêné. Benoît, lui, rigolait. C’était trop tard : nous nous tutoyions depuis un quatre d’heure, la breizhitude nous avait rapprochés comme une galette de la saucisse et il n’y avait pas de quoi en faire un fromage.

Nous poursuivîmes donc la soirée comme nous l’avions commencée, dans la joie et la bonne humeur, parlâmes de politique et d’amour, de la vie à Paris et ailleurs. Ce que je peux dire sur cette chouette soirée, c’est que Benoît but modérément, qu’il était de gauche – vraiment de gauche, je veux dire – et qu’il aimait le polar – sans me connaître, pour éviter toutes suspicions. Un gars simple, sympa, comme peuvent l’être les Bretons quand ils savent se tenir...

Cinq ans plus tard, je me retrouvai à « Libé » pour sa venue lors de la conférence du journal. «Benoît» ne m’a pas reconnu – il a dû croiser deux cent mille personnes depuis notre dîner chez les potes. Deux heures sur le gril, questionné, voire harcelé par l’équipe politique, sans notes, sans rien. Impressionnant le job de ces politiciens. Passionnant aussi… Ça va être dur pour lui de résumer en deux punchlines télévisées la complexité du monde qu’il a imaginé pour nous. Mais ce que je peux dire, c’est que le gars de Brest est toujours de gauche. Vraiment de gauche, je veux dire.