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Libération
Vu d'un lycée pro

«Les gens de la France de demain, c'est nous»

Sur les 14 élèves présents à un débat sur la présidentielle, seuls 4 sont certains d'aller voter. (Christophe MAOUT)
publié le 10 janvier 2017 à 17h36

Pendant la campagne, Libération va sonder, chaque jour de la semaine, six lieux différents de la «France invisible». Aujourd'hui, un lycée professionnel à Meudon, dans les Hauts-de-Seine

Ils ont sucré leur récréation et prolongé leur journée de cours pour venir «débattre» politique. Croyez-le ou non, nous n'avons vu aucun prof les forçant à rentrer dans la salle. Mieux encore : les élèves volontaires étaient tellement nombreux (14!) que la salle réservée s'est avérée trop petite. Après quelques minutes d'errements dans les couloirs, nous avons tous atterri sur des chaises de jardin, dans une immense salle en parquet où le moindre bruit résonnait. Nous voici à Meudon (Hauts-de-Seine), à quelques stations de RER au sud-ouest de Paris, dans le lycée professionnel Saint-Philippe. Un établissement privé sous contrat avec l'Etat, géré par la fondation Apprentis d'Auteuil qui s'active depuis cent cinquante ans pour aider les jeunes en difficulté. Ici, la majorité des élèves se préparent aux métiers de l'horticulture (les 13 hectares d'espace vert s'y prêtent). D'autres à la menuiserie. Notre assemblée du jour est composée essentiellement de garçons en filière Eleec (électrotechnique énergie équipements communicants). Au dernier rang, il y a aussi quelques filles préparant un bac pro de services à la personne. Pour chacun, cette présidentielle sera leur première élection.

Sondage à la volée : combien iront dans l'isoloir à coup sûr ? Quatre mains levées, dont Jahmyn, «un peu obligé par mes parents» qui lui rabâchent combien «c'est important». Dans le lot, il y a aussi Slade qui demande si «le vote blanc, ça compte». Les autres ? Quatre ont déjà décidé : ils n'iront pas voter. Les six restants n'ont pas d'avis arrêté, mais aucun n'est emballé. «Ils font tous des promesses, mais ne les tiennent jamais», dit Amin, 19 ans. Slade hausse les épaules. «De toute façon, les politiques prennent des décisions sans réfléchir aux conséquences que cela aura sur nos vies. Pourtant, les gens de la France de demain, c'est nous.» L'exemple qui lui vient en tête : la loi travail. Il soupire.

Sofia trouve d'une façon générale que les politiques ne s'intéressent pas aux jeunes. Quant à Jahmyn, il a du mal à se sentir concerné, «les discours sont tous un peu pareil». Approbation unanime de ses camarades. Pourtant, tous sont informés (en partie par les chaînes d'info en continu), ils citent sans se planter les principales figures de l'échiquier politique actuel. Marine Le Pen, «elle est pour le retour du franc», Fillon, «il ne veut plus de sécurité sociale». Le nom de Valls aussi leur parle, c'est moins évident pour Hamon et Montebourg. Et Mélenchon ? «Bien sûr, on le connaît, Jean-Luc», répond Slade.