Y croyaient-ils encore sincèrement, les élus LR qui ont agité ces dernières semaines une petite tempête pour exiger le rétablissement du cumul des mandats ? «Ils savaient que c'était enterré mais ils voulaient l'entendre de la bouche du candidat», expliquait lundi un fidèle filloniste. Alors François Fillon l'a répété encore : pas question de revenir sur l'interdiction du cumul d'un mandat de parlementaire et d'une fonction à la tête d'un exécutif local, qui doit prendre effet en 2017. Mais ce mercredi matin, devant une centaine de députés et sénateurs réunis au siège de campagne, il a voulu y mettre les formes.
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«Il n'y a aucune solution technique qui tienne la route pour revenir sur cette loi», a-t-il rappelé, la loi votée en 2014 entrant en vigueur un mois après les législatives de juin. Pour la détricoter, il faudrait voter ce texte ni une-ni deux, sitôt la nouvelle Assemblée installée, ce qui poserait par ailleurs un problème constitutionnel. Et surtout, quel curieux message adressé aux électeurs juste après la présidentielle ! «Comment nos concitoyens pourraient-ils comprendre que nous nous occupions de nous-mêmes avant de nous occuper d'eux ? Ce serait un bien mauvais début de mandat, pour moi, comme pour vous», insiste Fillon, qui fixe comme priorités «le redressement national et la renaissance européenne».
S'ils ont beaucoup poussé, ces dernières semaines, pour que François Fillon réexamine sa position, les derniers récalcitrants du non-cumul semblent avoir déposé les armes. «Les gens sont attachés à leur député-maire», a tenté l'un d'eux, lors de la réunion, pour battre en brèche l'idée d'une mesure très populaire dans l'opinion. Mais même Jean-François Copé ou Daniel Fasquelle ont, cette fois, plié. Le premier, député-maire de Meaux, a évoqué le stress de la fin du fief pour un parlementaire contraint de lâcher sa mairie et qui verra son rival lui contester le pouvoir localement. Mais il a aussi reconnu que le cumul ne pouvait pas être un sujet au cœur de la campagne. «Tu as tranché, c'est toi le candidat», a concédé Fasquelle, député-maire du Touquet.
«Il faut que tu nous donnes un peu d’affectif»
S’il a, le temps de la campagne, fermé la porte, le candidat LR à la présidentielle laisse une petite fenêtre entrouverte. Le président du Sénat, Gérard Larcher, et le chef de file des députés LR, Christian Jacob, ont été chargés d’une mission de réflexion sur les institutions. Au menu, essentiellement la réduction du nombre de députés et sénateurs, la place du Parlement, éventuellement une évolution du conseil économique, social et environnemental (CESE), le statut de l’élu. Et peut-être, sait-on jamais, pendant qu’on y est… une réflexion à nouveau sur le cumul de certains mandats ou une limitation plus souple de celui-ci?
Surtout, le candidat s'est efforcé de cajoler les parlementaires, leur assurant qu'il comprenait leur dilemme. «J'ai éprouvé le déchirement personnel que vous redoutez quand j'ai dû renoncer à la mairie de Sablé-sur-Sarthe pour prendre la tête de la région Pays-de-la-Loire», s'est-il livré. Des mots doux à l'oreille de ses troupes qui s'estiment mal traitées par Fillon. «Ça ne fait pas de mal de se sentir un peu compris. Jusque-là, il est quand-même dans un registre "marche ou crève"», reconnaît un participant. Ce que l'un d'eux a lancé à Fillon : «C'est bien d'avoir un programme. Mais il faut aussi que tu nous donnes un peu d'affectif et d'émotion.»