Plongée dans la vie (inventée) d’une cheffe d’entreprise, qui imagine sa vie à partir du (vrai) programme de Benoît Hamon. Notre personnage, Elise, a 34 ans. Elle est patronne d'une PME. Elise est la mère de Laura, 2 ans, et Robin, 11 ans, et son concubin, Mourad, 33 ans, est professeur des écoles.
Avertissement : Benoît Hamon n’ayant pour l’instant pas (ou peu) chiffré ses propositions, il est impossible à ce stade de présenter le financement des mesures ou, par exemple, la situation fiscale de nos protagonistes, dans sa France. Son programme ne fait par ailleurs pas de propositions complètes sur tous les thèmes. Il s’agit donc surtout d'imaginer, par cette mise en scène, comment sa vision de la société pourrait se traduire dans le pays… si ses propositions sont bien appliquées.
Santé
Ca y est, ils l'ont annoncé aux infos de 20 heures : les perturbateurs endocriniens et les pesticides les plus dangereux ont été interdits. En mâchant sa salade, Elise dit son soulagement : elle ne veut pas que Robin ou Laura subissent une puberté précoce, ou qu'ils mangent n'importe quoi. Mais ils restent vigilants, d'autant que l'air n'est pas encore revenu à un niveau de pureté satisfaisant : le diesel doit être interdit à l'horizon 2025, et en attendant, les pics de pollution restent réguliers, obligeant Robin à être vigilant avec son asthme. D'ailleurs, ça n'arrange pas vraiment Mourad, qui conduit le même véhicule diesel depuis huit ans, mais si c'est pour la santé de son fils… En lui passant la compote de rhubarbe, Mourad change de sujet et annonce à sa compagne que leur voisin du 3e, atteint d'un cancer du pancréas, a entrepris les démarches pour mourir dans la dignité. C'est Clotilde, la voisine à la langue bien pendue, qui le lui a dit, alors qu'elle rentrait de la maison de santé du quartier, où elle peut consulter plusieurs médecins libéraux. Le même jour, la nièce d'Elise, Sidonie, 17 ans, est allée faire renouveler sa contraception au centre de Planning familial, qui a rouvert il y a quelques mois.
Education
Depuis la mise en place du plan de formation des enseignants, Mourad peut demander quelques jours de formation par an (entre 3 et 10 selon l'expérience). Son point d'indice, en tant que fonctionnaire, a aussi été revalorisé. Et cette année, un nouvel enseignant est arrivé dans l'école (20 000 postes doivent être créés en tout en primaire sur le quinquennat). Elise et Mourad n'habitent pas dans une zone classée REP (réseau d'éducation prioritaire), mais la sœur d'Elise, si, depuis que la carte scolaire a été revue. Son neveu de 4 ans a donc pu être scolarisé dès l'âge de 2 ans. Quand il entrera au CP, il n'y aura pas plus de 20 élèves par classe (25 s'il n'était pas en REP) et il pourra bénéficier, comme tous les élèves du pays, du service public d'aide aux devoirs.
Citoyenneté
En mars 2020, la mère de Mourad, Sonja, qui vit en France depuis 30 ans mais a gardé la nationalité biélorusse, peut voter pour la première fois aux municipales. Mais pas pour l'ancien maire, qui, après trois mandats identiques consécutifs, n'a pu se représenter. A la prochaine présidentielle, Mourad et Elise ne pourront pas non plus voter pour Benoît Hamon, puisque le septennat a été rétabli et est devenu non-renouvelable. Mais ils consulteront avec attention la liste des grands donateurs (au moins 2 500 euros) de chaque candidat, dont la publication est désormais obligatoire.
En juin 2022, Elise et Mourad s'apprêtent à voter aux législatives. Depuis que le vote blanc est reconnu, Elise a l'impression d'être plus entendue, elle qui hésite souvent entre les candidats, et n'est que rarement convaincue à 100%. Mourad, lui, se réjouit qu'une dose de proportionnelle ait été introduite à l'Assemblée : il se sent mieux représenté, lui qui donne le plus souvent sa voix aux écolos ou au Parti de gauche.
Après avoir voté, le couple se rend au premier barbecue de l'été, où Mourad discute avec son pote Liang d'une loi que vient de voter le Parlement et qui leur déplaît. Il accepte de signer la pétition lancée par son ami, qui, si elle atteint 450 000 signatures, permettra de stopper la promulgation du texte et de lancer un référendum sur le sujet : c'est le «49.3 citoyen». Elise, elle, ne signe pas ; elle est favorable à la loi et s'agace de ce «49.3» qui, selon elle, bloque le pays. Les deux hommes s'interrogent aussi sur la possibilité d'intégrer le collège citoyen qui siège désormais au Sénat. Au-dessus de la viande fumante, Liang raconte qu'il cherche une maison à louer pour le mois d'août. La propriétaire de la bicoque qu'il avait repérée dans les Alpes a annulé la réservation quand Liang lui a envoyé la copie de son passeport. Certain qu'il a été victime de racisme, Liang a signalé les faits à l'Inspection de lutte contre les discriminations, nouvellement créée.
Culture
Les places de cinéma sont devenues moins chères, depuis que la TVA à taux réduit leur est appliquée. Ce ne change rien au fait qu'Elise n'a pas le temps d'y aller, mais elle se réjouit que ça pèse moins sur le budget de sa nièce Sidonie. Sidonie bénéficie également du Passeport Culture, réservé aux 12/18 ans, qui lui donne accès à des expos et des concerts. Cet été, la jeune fille fera un stage au service publicité de Mega 56, une chaîne de télévision privée. Ce service n'existe plus dans les chaînes de la télé publique, depuis que la pub y a été totalement supprimée. Sur Internet, elle a pu consulter le nom des propriétaires de Mega 56, ce qui est obligatoire depuis que la loi anti-trust dans les médias a été promulguée.
Emploi et entreprises
En rentrant, Elise croise sa voisine Clotilde dans le hall de l'immeuble. Elle est soulagée : son burn-out a été reconnu comme maladie professionnelle. Ses frais médicaux sont donc pris en charge à 100%, et elle perçoit une indemnité journalière pendant son congé maladie, à l'issue duquel elle compte demander de passer à temps partiel, ce que son patron ne peut plus lui refuser. Cela lui permettra de s'investir davantage dans l'association culturelle du quartier. Ce n'est pas la revalorisation de 10% du Smic que touche son mari qui permettra au couple de vraiment mettre du beurre dans les épinards, mais elle estime que son bien-être est plus important. De toutes façons, elle espère que le revenu universel sera bientôt mis en place pour tous, ce qui lui permettra de garder un niveau de vie correct tout en travaillant moins.
Dans l'entreprise où travaille Clotilde, une grosse boîte de 3 000 salariés, les représentants du personnel au Conseil d'administration ont désormais un droit de veto. Et avec l'abrogation de la loi travail, les accords d'entreprise ne priment plus sur les accords de branche. Clotilde, qui ne s'arrête décidément plus de parler, raconte que son patron, qui veut changer de boîte, hésite car il ne touchera pas sa retraite chapeau, désormais prohibée en cas de démission. Devant sa voisine, Elise s'en réjouit, mais elle est soulagée, in petto, que cette histoire de veto ne s'applique pas à sa PME… Elle prend congé, prétextant des lessives à faire (car dans le France de Benoît Hamon, il ne faut pas croire aux miracles : la répartition des tâches entre hommes et femmes n'est toujours pas idéale…). En remontant l'escalier, Elise note sur son pense-bête de demander demain à sa comptable combien la taxe sur la richesse créée par les robots va coûter à son entreprise cette année.
Libertés
De temps en temps, le soir, après avoir couché les enfants, Elise et son compagnon aiment partager un joint, installés sur leur balcon, en se racontant leur journée. Avant, Elise commandait son herbe à Martin, un petit dealer du quartier – elle ressentait d'ailleurs une certaine culpabilité, de savoir qu'elle participait à nourrir un trafic illégal, même si elle préférait ne pas trop y penser. Maintenant, elle l'achète légalement. Entre deux tafs, elle se demande ce que Martin est devenu. Pensée qu'elle balaye dès que Mourad lui raconte avoir reçu un appel de sa copine de fac Emilie, qui lui a annoncé que son épouse, Jessica, était enfin enceinte. Avec l'extension de la PMA aux lesbiennes, les deux femmes n'ont pas eu à se rendre en Espagne ou en Belgique pour avoir un enfant.
Sécurité
Annick, la mère d'Elise, est policière. Elle travaille dans une zone dite difficile, en banlieue de Brest. Elle devrait donc toucher une prime. Depuis l'élection de Benoît Hamon, elle doit délivrer un récepissé à chaque fois qu'elle procède à un contrôle d'identité. Certains collègues grognent que ça fait beaucoup de paperasse… Annick, elle, s'en fiche un peu, car elle doit partir à la retraite cette année. De toutes façons, depuis qu'ils n'ont plus à faire la chasse au petit dealer de shit, Annick trouve qu'elle et ses collègues ont plus de temps. Quand elle sera à la retraite, elle sera remplacée, comme tous les gendarmes et policiers dans son cas. De plus, 1 000 postes doivent être créés pour renforcer les équipes (d'ailleurs, d'ici la fin du quinquennat, 3% du PIB doivent être consacrés à la sécurité et la défense). En rentrant chez elle, Annick salue Hervé et Thibault, des policiers de proximité, en pleine discussion avec quelques habitants.
Solidarité
En attendant la mise en place du revenu universel, les minima sociaux ont été revalorisés. Ce n'est pas la panacée, mais c'est toujours ça de pris pour Paul, le beau-frère d'Elise, qui touche le RSA et l'allocation adulte handicapé, après un grave accident de ski qui l'a laissé invalide à 60%.