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Billet

Le «Hamon bashing» est d'abord un signe de faiblesse

Hamon candidatdossier
Benoît Hamon au Palais des sports Saint-Sauveur, le 28 janvier à Lille. (Photo Marc Chaumeil pour Libération)
publié le 1er février 2017 à 9h45

Le «Hamon Bashing» ne s'est pas arrêté après la victoire très nette du candidat de l'ex-ministre de François Hollande à la primaire de la Belle Alliance Populaire. Bien au contraire. Après les éditorialistes qui ne cessent de le prendre sur le même ton hautain comme s'ils se regrettaient ce choix (lire la chronique de Daniel Schneiderman du lundi 30 janvier), c'est au tour de ses amis socialistes de lui contester sa légitimité. Ou de lui mettre la pression pour le ramener dans un supposé droit chemin socialiste.

Dans une tribune publiée dans le Monde, les députés PS Christophe Caresche et Gilles Savary osent en appeler publiquement à un «droit de retrait» de la campagne pour les réformateurs du parti. Même s'il ne s'agit pour le moment que d'une mise en garde, l'expression employée est particulièrement mal venue. Présent dans le code du travail, ce droit de retrait s'applique pour les salariés faisant face à «un danger grave et imminent pour leur vie ou leur santé». Quel est le danger grave concernant Benoît Hamon ? Gagner l'élection présidentielle et devoir mettre en place le programme pour lequel il a été élu ? Perdre après avoir bataillé sur le terrain des idées ? C'est le pire qui puisse arriver mais il serait surréaliste de lui en imputer la faute plutôt qu'à ceux qui refusent aujourd'hui de le soutenir ou cherchent à entraver sa dynamique au terme d'un processus électoral démocratique, transparent et accepté de tous.

Amnésie volontaire

Voilà sur la forme. Sur le fond, cette tribune pratique également l'amnésie volontaire en opposant cette campagne avec celle de 2012 : «Notre famille sortait alors renforcée d'une primaire qui avait fortement mobilisé, unifié la gauche et engendré une dynamique forte autour de notre candidat, créant ainsi les conditions de la victoire à l'élection présidentielle, un an plus tard. Aujourd'hui, le constat est tout autre : des divisions plus profondes que jamais et une césure réelle entre deux sensibilités idéologiquement distantes.» Ses signataires estiment donc que la victoire de 2012 s'était cristallisée autour d'une colonne vertébrale uniquement sociale-libérale. C'est oublier bien vite que la dynamique Hollande, notamment auprès des jeunes, s'était amplifiée après le discours du Bourget de janvier 2012 et son fameux «mon ennemi c'est la finance». C'est rayer d'un trait le virage opéré en cours de mandat à l'origine d'une fronde interne mais aussi d'une défiance grandissante de l'opinion qui a connu son paroxysme avec la loi Travail. C'est nier la perception globalement négative de ce quinquennat malgré des avancées indéniables. Et c'est refuser de voir que le programme d'Hamon tente d'apporter une réponse à cette défiance en initiant une campagne de propositions et non de posture, qui a fait la différence durant la primaire.

Ironie de cette histoire qui bouscule les habitudes de campagne, et c’est tant mieux, la désaffection de caciques socialistes qui occupent l’espace politique depuis tant d’années et qui sont aujourd’hui tentés de rallier Macron, n’est pas forcément une mauvaise nouvelle pour Benoît Hamon dans sa volonté d’incarner une nouvelle dynamique. Et à l’inverse, que la maison En Marche ! finisse par ressembler à une annexe du Parti socialiste ne sert pas les intérêts de Macron dont la volonté réformatrice cadre mal avec l’image vieillissante qui colle à la peau de ces ralliements. On peut comprendre que toutes ces expressions de demande de renouvellement politique à gauche puissent faire peur. Il serait criminel -pour reprendre une expression du niveau du «droit de retrait»- de les empêcher de s’exprimer et d’aller au bout de leurs idées.