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Libération
Edito

Plateforme

publié le 7 février 2017 à 20h16

On a plus de chances de donner le nom des deux finalistes du second tour de la présidentielle de 2017 en faisant appel aux astres qu’en scrutant l’état de l’opinion. Les favoris tombent les uns après les autres, envoyant l’éditorialiste péremptoire au comptoir du bar des Sports. Faute de certitudes, on peut estimer que la fameuse rencontre entre le peuple français et un destin, telle qu’on nous la raconte à chaque présidentielle, a du mal à se dessiner. Il y a de quoi être sceptique après les expériences les plus récentes. L’hyperprésident a fait un tour, le président normal a dû renoncer avant même de pouvoir défendre son bilan. Et si le changement, c’était vraiment maintenant ? Si on en finissait avec la quête, vaine, de l’homme - ou la femme - providentiel ? Le débat à gauche est à ce titre doublement intéressant. Il met en scène des personnalités opposées, des propositions politiques a priori irréconciliables, des stratégies antagoniques, mais des références communes (Jaurès, Mitterrand…), et l’impression grossièrement arithmétique qu’une union des forces permet de déjouer tous les pronostics. Pour que les additions ne s’effacent pas derrière les personnalités, il faudrait partir des projets de chacun, et prendre au mot leurs envies communes de démocratie citoyenne. Que les candidats s’effacent. Guidés par des experts, leurs représentants rédigeraient une plateforme commune, en s’entendant point par point, écartant ce qui divise, cherchant le compromis et le consensus, comme le sont les contrats de gouvernement en Allemagne. Ou comme l’Islande l’a fait, ajoutant une dynamique participative pour rédiger sa Constitution. C’est la meilleure façon de se prémunir des promesses irréalistes et des déceptions futures. La méthode est sans doute trop moderne pour une France gaullienne, et on peut malheureusement parier qu’elle se fracassera sur certains egos. Mais le mot «impossible» n’est pas 2017.