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Libération
Interview

Adam Nossiter : «Si ça avait été chez nous, Fillon aurait dû sortir de la campagne»

publié le 12 février 2017 à 20h36

Adam Nossiter est correspondant à Paris du New York Times. Pour le quotidien américain, il couvre notamment la campagne présidentielle française, qui apparaît d'abord comme une bataille d'«insiders».

«Cette élection suscite un grand intérêt aux Etats-Unis, principalement parce que Marine Le Pen est considérée chez nous comme une sorte d’épigone gaulois de Donald Trump. D’un point de vue américain, c’est là que se trouve l’enjeu du scrutin, avec l’autodestruction des deux principaux partis traditionnels. L’opinion commune aux Etats-Unis est que la vie politique française est une compétition entre "insiders", entre privilégiés, un stéréotype qui correspond assez bien à François Fillon. Une nouvelle fois, l’offre politique ne répond donc pas à la demande électorale : les socialistes semblent hors-jeu, et Fillon n’en est pas loin non plus. De même que chez nous, l’électorat a rejeté les démocrates, mais aussi les républicains "classiques" en choisissant l’outsider Trump.

«Selon moi, cependant, il ne faut pas exagérer la ressemblance entre Donald Trump et Marine Le Pen : cette dernière me semble infiniment plus sophistiquée que notre nouveau président. Son langage est plus soigné, son discours plus complexe, ses mensonges moins flagrants. Marine Le Pen dit qu’un islam "laïcisé" est compatible avec la République ; Trump ne pourrait jamais en faire autant.

«Cela dit, il y a dans la campagne française d’autres curiosités pour un œil américain : le fait que l’on prenne au sérieux l’idée d’un revenu universel. Chez nous, cela semblerait absolument loufoque, il serait impossible de le proposer sans passer pour un fou. Il y a également le fait que François Fillon reste encore en jeu, alors qu’il aurait dû, chez nous, sortir de la campagne.»