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Libération
Vu d'un lycée pro

«Le cannabis, ça fait de la merde, alors pourquoi vouloir légaliser ?»

La France invisibledossier
Pendant la présidentielle, Libération sonde, chaque jour de la semaine, des personnes que l'on entend peu ou pas dans les médias. Ce mercredi, des jeunes préparant un bac professionnel, à Meudon, près de Paris.
(BiG)
publié le 14 février 2017 à 20h36

Pendant la présidentielle, Libération sonde, chaque jour, des lieux de la «France invisible», hors des radars habituels des médias. Ce mercredi, des élèves en lycée professionnel à Meudon (Hauts-de-Seine).

Ils sont jeunes, plein de vie et d'envies. Cette année, pour la première fois, ils peuvent user de leur droit de vote. Seulement voilà, sur les neufs garçons en première et terminale électrotechnique que nous suivons depuis début janvier, seuls trois lèvent la main quand on leur demande s'ils iront voter à la présidentielle. Ajoutez quatre mains qui «savent pas encore», façon polie de dire qu'il y a peu de chance qu'ils se décident. Et Vincent, 19 ans : «Au second tour, j'irai peut-être, on verra.» Bras croisés, les deux autres ne se montrent guère hésitants : «Non, sûr que non. Pourquoi j'irai ? Donnez moi une seule bonne raison de voter», interpelle Slade, qui a pourtant toujours beaucoup de choses à dire. C'était juste avant les vacances de février, en pleine affaire Fillon.

Ce jour-là, alors qu’aucun sujet politico-politique ne les branchait, on a posé sur la table un débat de société «concernant» comme on dit. Et présent dans certains programmes de cette campagne : le cannabis. Un jeune de 17 ans sur deux a déjà fumé un joint, selon l’Observatoire des drogues et toxicomanie. Statistique confirmée haut la main dans notre panel du jour. A gauche, trois candidats - Benoît Hamon (PS), Jean-Luc Mélenchon («la France insoumise») et l’écologiste Yannick Jadot - militent pour sa légalisation. Une façon de réduire les risques sanitaires et le trafic.

Et dans cette classe, qu'en pensent-ils ? Les réponses sont à rebrousse-poil des idées reçues. Les voici, saisies à la volée : «Le truc, c'est que s'ils [les politiques] légalisent, les dealers, ils vont être dans la merde» ; «C'est clair, ça risque d'augmenter encore plus le trafic des autres drogues, les dures» ; «J'ai entendu je sais plus qui dire qu'il voulait enlever la monnaie. Si y a plus de liquide, le problème est réglé, il n'y aura plus de dealers» ; «Les jeunes, madame, ils sont toujours attirés par ce qui est illégal, c'est comme ça. Donc si le cannabis devient légal, les jeunes vont se tourner vers d'autres drogues illégales» ; «Fumer des joints, ça détruit les gens, vrai ou pas ? Ça fait de la merde, alors pourquoi vouloir légaliser ?» ; «Ça ferait plus d'argent dans les caisses de l'Etat. Et puis ça permettrait aux flics de faire de vrais trucs utiles plutôt que de s'occuper du trafic.» Entendu, enfin : «Moi, la légalisation, je suis pour à 200 %. Le cannabis, y a quand même rien de mieux après la baise… Non ?»