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Libération
Plan B

Les frondeurs LR demandent à Fillon de renoncer

Fillon, candidat de la droite en 2017dossier
A l'initiative de parlementaires sarkozystes, 17 élus se sont réunis lundi soir pour réclamer la désignation d'un autre candidat.
François Fillon le 2 février en déplacement dans les Ardennes. (Photo Albert Facelly)
publié le 14 février 2017 à 9h06

Ils étaient 17 à table. Ils avaient tellement peu l’intention de se cacher qu’ils ont choisi de dîner au Bourbon, le plus visible et le plus fréquenté des bistrots du quartier de l’Assemblée dans le VIIe arrondissement de Paris. Réunis à l’initiative des députés LR Georges Fenech et Alain Gest ainsi que du sénateur Alain Houpert, tous sarkozystes, ils entendaient échanger sur l’impossible campagne de François Fillon et sur les moyens de sortir du blocage.

En matière de réunion conspirative, l’endroit a une certaine tradition : c’est au Bourbon que se réunirent, à l’initiative de Chirac, les signataires du légendaire «appel des 43» en faveur de Giscard. En 1974, Cette trahison de députés de la famille gaulliste fut le coup de grâce pour Jacques Chaban-Delmas, compagnon du Général.

«Le constat de l’incertitude»

Selon ses organisateurs, le dîner des 17 Fillon-sceptiques avait un caractère œcuménique puisque deux juppéistes, une UDI et un soutien de Bruno Le Maire s’étaient joints aux amis de l’ancien chef de l’Etat. Mais il n’y avait, parmi les présents, aucune tête d’affiche, à l’exception de figures originales comme Nadine Morano. Porte-parole officieux de Nicolas Sarkozy, Brice Hortefeux s’est soigneusement tenu à l’écart. Sa présence aurait été interprétée comme une manœuvre sarkozyste. Quant aux quinquas et quadras qui ont des ambitions nationales, ils savent que le premier qui bouge est un homme mort.

Ce sont donc des sans-grade qui se sont chargés du sale boulot. Ceux-là mêmes qui étaient déjà à la manœuvre début février quand fut lancé un premier projet de tribune en faveur d'un plan B. «Je pense que les parlementaires doivent se ressaisir et dire tout haut les choses, c'est-à-dire qu'il faut arrêter et ne pas attendre quinze jours» expliquait alors Houpert. «Il faut un homme politique neuf et jeune» avait-il ajouté, sa préférence allant à Laurent Wauquiez ou François Baroin. Au même moment, Fenech jugeait «caduc» le résultat de la primaire et appelait à la convocation d'un «Conseil national extraordinaire» pour désigner un nouveau candidat.

Etouffée par la conférence de presse du 6 février, la révolte reprend donc de plus belle, avec les mêmes acteurs, une semaine plus tard. «Nous avons fait, ensemble, le constat de l'incertitude grandissante sur une campagne à propos de laquelle nous n'avons jamais pu nous exprimer. Nous sommes tous tombés d'accord sur le fait qu'il fallait trouver une autre solution» expliquait Houpert lundi soir en sortant du Bourbon. «Nous sommes en face d'une situation désastreuse. On ne peut plus faire campagne», a renchéri Georges Fenech, qui réclame toujours le retrait de Fillon. Le député de la Somme Alain Gest est à peine moins définitif : «Nous avions besoin de nous parler pour vérifier que nous ne nous trompions pas de diagnostic. Nous constatons que nous sommes dans l'impossibilité de faire campagne. Ce mardi, nous avons l'intention de poser collectivement la question à François Fillon qui est aussi, de facto, le président de notre famille politique.»

 «Méthode alternative»

Un texte sera proposé à la signature. Selon Gest, il sera approuvé par les 17 convives du Bourbon et par au moins autant d'autres qui «sans être présents lundi soir souscrivent à notre démarche». Le député précise que la question du Plan B n'a été qu'évoquée que pour lister les différentes hypothèses, sans privilégier aucun candidat. «Puisque la primaire est caduque, nous devons nous mettre d'accord sur une méthode alternative.» Les frondeurs de LR ont recensé trois possibilités : convocation du seul BP, quelques dizaines de membre, réunion extraordinaire des quelque 2000 membres du Conseil national ou encore organisation d'un vote électronique ouvert à l'ensemble des militants, ce qui serait une belle revanche pour ceux qui n'ont jamais vraiment accepté le principe d'une primaire ouverte.

Et si Fillon renonçait en adoubant Juppé ? «Pourquoi pas, à condition que ce ne soit pas sur la ligne qu'il a défendue à la primaire» répond le sarkozyste Alain Gest, assurant que son seul objectif était de donner à sa famille politique «une chance d'être au deuxième tour». François Fillon a modifié son agenda pour répondre ce mardi matin à ceux qui veulent sa destitution. Il devrait être à 11 heures devant le groupe LR à l'Assemblée. Une nouvelle épreuve - presque une routine - dans cette campagne qui vire au chemin de croix.