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Droite

Bayrou : le camp Fillon lâché par son meilleur ennemi

Même si une partie de la droite voue une haine tenace à Bayrou, sa candidature était secrètement espérée.
François Fillon dans l’Oise, le 15 février. (Photo Albert Facelly)
publié le 22 février 2017 à 20h36

Déception chez les soutiens de Fillon où certains se laissaient aller à rêver d’une quatrième candidature Bayrou venant opportunément affaiblir celle d’Emmanuel Macron. Certains évoquaient déjà la possibilité d’une petite récompense pour une poignée de candidats du Modem aux législatives… Il n’en sera rien.

Très colère, les fillonistes ont inondé les réseaux sociaux d'anciennes déclarations du leader centriste. Sa prise de position en mai 2012, à la veille du second tour de la présidentielle («le vote Hollande, c'est le choix que je fais»), et surtout cette inoubliable analyse au vitriol, postée sur Twitter le 7 septembre («derrière Macron, il y a de grands intérêts financiers»).

Mal absolu. Au QG de Fillon, on assurait mercredi soir que cette décision n'avait «rien d'étonnant» et qu'il était somme toute logique que celui qui a «aidé Hollande à se faire élire» en 2012 vole cinq ans plus tard au secours de son héritier masqué. «Tous les candidats étant maintenant connus, place au débat de fond, projet contre projet», réagit l'entourage du candidat qui mise, plus que jamais, sur «la solidité» de son programme.

Selon le filloniste Jean-François Lamour, Bayrou sera «un allié bien encombrant» pour le fondateur d'En marche, qui va devoir donner quelques circonscriptions gagnables à son nouvel allié, cédant ainsi à «ces cuisines politiciennes» auxquelles Bayrou se dit étranger. «Tout cela va encore plus ressouder nos troupes autour de François Fillon», veut croire Lamour.

C'est sans doute vrai des troupes sarkozystes, pour qui le maire de Pau est le mal absolu. L'ancien chef de l'Etat avait fait de la détestation de Bayrou le carburant de sa campagne contre Alain Juppé engagé, lui, dans une alliance contre-nature. Si les sarkozystes sont prêts à relancer la croisade contre «le traître», il n'est pas garanti que les juppéistes seront aussi enthousiastes. «Tout ce qui crédibilise Macron comme candidat du centre est mauvais pour Fillon», confie un ancien soutien du maire de Bordeaux. Pour contrer l'ex-ministre de l'Economie, le camp Fillon martèle qu'il n'est rien d'autre que le candidat de substitution de Hollande.

«Copains». Avant l'explosion de l'affaire des emplois supposés fictifs, le vainqueur de la primaire «de la droite et du centre» et Bayrou ont souligné à plusieurs reprises le caractère «amical» de leurs relations. Tout en qualifiant de «dangereux» le programme du candidat LR, le centriste avait assuré qu'il ne «fermait aucune porte». Fort de sa large victoire sur Juppé, Fillon avait indiqué que son projet n'était pas négociable et qu'il était impossible de promettre au patron du Modem un groupe de 20 députés en échange d'un accord. Jusqu'à la fin janvier, les deux hommes sont restés en contact. «On est copains. Mes relations avec lui nous permettent de parler en liberté», confiait au Figaro le Béarnais.

Le ton a brutalement changé après les révélations du Canard. Invité fin janvier sur TF1, Bayrou avait estimé que le scandale créait «un trouble énorme, un chaos sans précédent que les citoyens voient avec stupéfaction et désarroi». Loin de défendre son «copain», il s'était demandé s'il y avait «une loi pour les puissants, ou une justice pour tous» et si les «sacrifices» attendus des Français étaient bien «équitablement répartis». L'alliance avec Fillon devenait dès lors très improbable.