François Fillon a annoncé mercredi qu'il maintenait sa candidature à l'élection présidentielle en dépit de sa convocation par les juges d'instruction, le 15 mars, en vue de sa mise en examen. Toute la matinée, à la suite de l'annulation de sa visite au Salon de l'agriculture, les réseaux sociaux avaient bruissé de rumeurs plus ou moins plausibles concernant la procédure judiciaire qui l'attend. Or, celle-ci devra se plier aux contraintes imposées par le statut du candidat LR, député, qui bénéficie de l'immunité parlementaire, comme l'a rappelé l'avocat-blogueur «Maître Eolas».
Rappel : François Fillon ne peut être placé en garde à vue du fait de son immunité parlementaire (Le parlement est toujours en session)
— Maitre Eolas (@Maitre_Eolas) March 1, 2017
C’est quoi, l’immunité parlementaire ?
L'Assemblée nationale qualifie d'immunité «l'ensemble des dispositions qui assurent aux parlementaires un régime juridique dérogatoire au droit commun dans leurs rapports avec la justice afin de préserver leur indépendance».
Jusqu’à quand Fillon est-il concerné par cette immunité ?
L'immunité parlementaire court jusqu'au terme du mandat de député de François Fillon. Et bien que l'Assemblée nationale ait suspendu ses débats à partir de lundi pour cause de campagne électorale, la session parlementaire se poursuit jusqu'au dernier jour ouvrable de juin, soit le vendredi 30 juin. En effet, l'Assemblée peut, seule, décider de reprendre les débats, sans qu'une session extraordinaire soit ouverte par décret.
Que risque-t-il ?
On distingue deux volets d'immunité :
L'irresponsabilité, qui exclut toute poursuite judiciaire à l'encontre de parlementaires pour des actes liés à l'exercice de leur mandat («interventions et votes, propositions de loi, amendements, rapports ou avis, questions, actes accomplis dans le cadre d'une mission confiée par les instances parlementaires», liste l'Assemblée nationale). Elle a, toujours selon le site de l'Assemblée, «un caractère absolu, car aucune procédure ne permet de la lever. […] Elle est perpétuelle et s'oppose aux poursuites motivées par les actes accomplis durant le mandat, même après la fin de celui-ci».
L'inviolabilité, elle, est le volet de l'immunité qui vise à protéger le parlementaire de certaines actions pénales visant des actes accomplis lorsqu'il ou elle était un citoyen ordinaire. Ce régime d'immunité protège le parlementaire contre toute mesure coercitive privative ou restrictive de liberté (arrestation, contrôle judiciaire, garde à vue) mais le laisse vulnérable à l'engagement de poursuites (via une mise en examen) depuis la réforme du 4 août 1995. «Contrairement à l'irresponsabilité, note l'Assemblée, l'inviolabilité a une portée réduite à la durée du mandat.»
En l'occurrence, François Fillon peut donc être mis en examen, mais l'inviolabilité le protège pour l'instant d'une éventuelle garde à vue. Gare aux rumeurs, donc.
Que faudrait-il pour qu'elle soit levée ?
C'est le second volet, celui de l'inviolabilité, qui peut en fait être levé, après requête des autorités judiciaires en ce sens. La demande doit être formulée par le procureur général près la cour d'appel compétente, et transmise au ministère de la Justice, qui la communique au président de l'assemblée concernée. L'Assemblée nationale, en l'occurrence, a ensuite le pouvoir d'«autoriser, le cas échéant, l'arrestation d'un parlementaire ou la mise en œuvre, à son encontre, de mesures privatives ou restrictives de liberté».