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Libération

Que serait une réforme de la machine à décider ?

publié le 2 mars 2017 à 19h36

Le vendredi, Thierry Mandon, secrétaire d’Etat à l’Enseignement supérieur, chronique la campagne électorale.

On fait comment ? Tous les cinq ans, l’élection présidentielle se travestit en kermesse de la pensée magique. On y débat ardemment de propositions, d’ambitions, de changement et de grands choix qui permettront de traiter les problèmes des Français. Contrairement à une pensée répandue par ces temps de défiance, il ne faut pas douter de la sincérité des candidats. Pour l’essentiel, ils croient à ce qu’ils promettent. C’est bien le problème.

Je veux donc je peux ! Prétention de campagne, aveu d’échec assuré. Car depuis plusieurs quinquennats, l’intendance ne suit pas. Après mise en œuvre, les meilleures intentions produisent des résultats bien différents des effets escomptés. Et des choix initialement opposés aboutissent à des politiques publiques peu différenciées. La machine à décider est en panne. Cette fabrique est devenue machine à raboter, émasculer, trahir. Il ne faut pas chercher plus loin les sources profondes de la défiance de masse et de la tentation des citoyens de renverser la table. Que serait une réforme d’ampleur de la machine à décider ? Une exigence qualité généralisée.

Qualité de la fabrique de la loi et des décisions publiques en s’appuyant largement sur l’expertise des citoyens, des chercheurs ; en passant plus de temps avant la prise de décision pour en gagner après ; en légiférant moins et en simplifiant beaucoup plus. Qualité dans l’association plus étroite des usagers à l’amélioration du fonctionnement des principaux services publics, ce qui passe par leur déconcentration, et dans l’évaluation concrète de leurs résultats. Qualité de notre architecture démocratique qui doit calmer les hommes providentiels et promouvoir des formes plus collaboratives de décisions publiques. Qualité de l’éthique publique, de la transparence des débats et de l’ouverture des données. Qualité de l’encadrement supérieur de l’Etat avec des hauts-fonctionnaires socialement plus divers et formés à l’apprentissage du doute et du dialogue plutôt qu’à la suffisance. Belle idée, mais comment fait-on là aussi ? Il n’y a plus le choix.

Soit, du bouillonnement des turpitudes dans lesquelles nous sommes enlisées, un candidat tirera la conviction qu'il faut porter cette feuille de route, s'engager à l'appliquer méthodiquement, l'imposer à une administration et des corporatismes qui s'y opposeront, préférant ainsi une transformation dans la réalité à une bataille sémantique autour de la numérotation de la République : Vou VIe ?

Soit, les turpitudes nous mèneront au bouillon.