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Décryptage

Hamon et l'éducation : dans la continuité du quinquennat Hollande

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Le candidat du PS détaille dix engagements pour l'école ce jeudi. La plupart dans la continuité de l'action menée au cours des cinq dernières années. Sauf peut-être son ambition de créer un «service public de soutien scolaire».
Benoît Hamon en réunion publique à l' Acropolis de Nice, le 15 mars. (Photo Laurent Carre pour Libération)
publié le 16 mars 2017 à 12h36

Benoît Hamon, le candidat du PS, a détaillé ce jeudi matin son programme par le menu. En matière d'éducation, il s'inscrit dans la droite ligne du quinquennat Hollande. Son équipe de campagne le revendique même. «L'éducation, c'est la fierté du bilan de ces cinq dernières années. Le domaine où la gauche a le mieux réussi, même si les effets de la loi de refondation ne sont pas visibles immédiatement, défend Yannick Trigance, député de Seine-Saint-Denis, dans l'équipe Hamon pour plancher sur l'éducation. Nous espérons qu'il y aura un vrai débat sur ce thème pendant cette campagne, pour que les électeurs voient aussi combien nos propositions reflètent aussi un projet de société, tout à fait différent de celui de la droite.» Et de celui de Macron ? Deux mesures clés distinguent le leader d'En marche du candidat socialiste : le recul sur la réforme des rythmes scolaires et l'autonomie de recrutement des enseignants pour les chefs d'établissement. Revue des principaux engagements de Benoît Hamon, pour le primaire et le secondaire.

40 000 créations de postes

Hollande en avait fait un slogan de campagne avec ses 60 000 promesses d’embauche. Cinq ans après, Hamon avance, lui, la promesse de 40 000 créations de postes sur les cinq prochaines années, avec une priorité assumée pour le primaire : la moitié des postes (20 000) seront affectés au premier degré, et 3 000 pour la maternelle. 15 000 postes seront consacrés à la formation continue et 2 000 pour renflouer le bataillon de remplaçants (en primaire et secondaire), qui avait été décimé sous Sarkozy. Hamon promet aussi de doubler les primes (Isae et Isoe) versées aux enseignants, soit environ 800 millions d’euros ainsi distribués.

Scolarisation obligatoire dès 3 ans

Aujourd'hui, en France, l'instruction est obligatoire à partir de 6 ans. Le PS propose de l'avancer à 3 ans. Cette mesure semble surtout symbolique : seuls 5% des enfants entre 3 et 6 ans ne sont pas scolarisés aujourd'hui. Autre objectif, que se fixe Hamon, plus ardu : faire progresser le taux de scolarisation des enfants de 2 ans dans les écoles d'éducation prioritaire. C'était déjà une promesse de campagne en 2012. Hollande s'était engagé à l'époque à tripler le nombre de tout-petits dans les maternelles des zones défavorisées pour atteindre un taux de scolarisation de 30%. A la dernière rentrée, le dispositif patinait autour de 20,6%… Hamon propose de persévérer.

Des effectifs (un peu) réduits dans les classes en primaire

Le candidat du PS propose de fixer à 25 maximum le nombre d’élèves par classe, en CP, CE1, CE2. Et à 20 dans les écoles d’éducation prioritaire, d’outre-mer et des territoires ruraux. Il entend aussi, même si les choses restent à préciser, baisser le nombre d’élèves dans les classes où l’un des enfants serait porteur de handicap.

Cet engagement appelle à plusieurs commentaires. Selon les données publiées chaque année par le ministère de l'Education, on compte aujourd'hui en moyenne 25,5 élèves par classe en primaire. L'engagement de Benoît Hamon ne semble donc pas très ambitieux, même si cette moyenne nationale masque des variations d'une école à l'autre. Autre interrogation : l'état de la recherche scientifique. Aujourd'hui, le lien entre taille de classe et performance des élèves n'est pas clairement établi par la recherche, sauf à diminuer le nombre d'élèves de manière conséquente, comme le rappelait dans Libé Georges Felouzis, professeur de sociologie de l'éducation à l'université de Genève.

Un grand service public d’aide aux devoirs

C'est peut-être la principale nouveauté de Benoît Hamon qui ne soit pas dans la poursuite du quinquennat précédent. Le candidat veut s'attaquer à cette source d'inégalité de plus en plus criante. Aujourd'hui, rappelle Yannick Trigance, «un élève sur 10 en sixième prend des cours de soutien scolaire. C'est un sur cinq en troisième…» Comment Hamon compte-t-il s'y prendre ? «Il faut inclure dans le temps scolaire des élèves le travail personnel et les devoirs qui, aujourd'hui, sont à faire à la maison», explique Hamon dans son programme. Sans donner plus de détail. Va-t-il réduire le temps d'enseignement de certaines disciplines ? Seul élément concret : le budget. 400 millions d'euros seront consacrés à «ce service public du soutien scolaire».

Soutien financier aux communes pour les rythmes scolaires

Là encore, dans la lignée du quinquennat précédent, Benoît Hamon propose de renflouer davantage le fonds de soutien aux communes. L'enveloppe, aujourd'hui de 400 millions d'euros, sera augmentée de 25% sur cinq ans. Soit 25 millions par an «d'abord pour les communes populaires et rurales».

Aller plus loin dans la mixité sociale

Benoît Hamon reprend là aussi un objectif inscrit dans l'article premier de la loi de Refondation de l'école de 2013 : «Le service public de l'éducation veille à la mixité sociale des publics scolarisés au sein des établissements d'enseignement.» Cette ambition s'est pour l'instant traduite par douze expérimentations menées par des départements volontaires, et n'impliquant à chaque fois que deux ou trois collèges… Benoît Hamon dit vouloir passer de l'expérimentation à la généralisation. «Cette politique sera axée sur la sectorisation, l'affectation et une contractualisation avec l'enseignement privé pour qu'il participe à l'effort de mixité sociale.» Comment compte-t-il faire en pratique ? Avant lui, aucun responsable politique n'a réussi à vraiment avancer sur cette question. Passera-t-il par la loi pour obliger les chefs d'établissement du privé à jouer le jeu ? Il semble que la réponse soit non, sans dire en pratique comment il compte s'y prendre.