Menu
Libération
Vu d'un vestiaire de hand

Présidentielle : «Les mecs te vendent de l'utopie !»

La France invisibledossier
Chroniques la France invisible : Marseille. (BiG)
par Stéphanie Harounyan, à Marseille
publié le 24 mars 2017 à 14h19

Pendant la présidentielle, «Libération» va sonder, chaque semaine, cinq lieux différents de la «France invisible». Ce vendredi, un club de handball près de Marseille.

Le sac de sport de Romain atterrit lourdement sur le banc du vestiaire. «J'en peux plus, démarre le joueur en colère. Depuis ce matin, j'ai pas arrêté d'entendre que ce qu'ont dit Hamon et Mélenchon, c'était bien… J'ai envie de pleurer ! Les mecs te vendent de l'utopie !» Pas la peine de demander, Romain a regardé le débat de lundi soir sur TF1. «J'en reviens pas que l'on se présente avec des programmes pareils, peste encore le trentenaire. Rien n'est chiffré ! Si tu les écoutes, ils ont tous les solutions pour résoudre d'un coup les trente-quarante années de merde que l'on vient de vivre !» Nicolas aussi s'est un peu ennuyé, même si Jean-Luc Mélenchon a sauvé sa soirée. «C'est quand même le seul à avoir rebondi quand les journalistes ont lancé le sujet des affaires», savoure-t-il. Romain veut bien l'admettre, l'homme a du charisme, mais c'est le fond qui ne passe pas. «Quand il dit qu'on va remplir les carnets de commandes, il croit que ça se fait du jour au lendemain ? Moi, je sais comment ça se passe. Dire ça, c'est mentir aux gens !»

Gilles, lui, a surtout observé l'attitude de Macron, le néophyte de la bande. «Je l'ai trouvé un peu frileux, mais en toute honnêteté, c'est quand même lui qui a gagné le débat, soutient-il. Quand il a lancé à Marine l'histoire du ventriloque, il avait une quasi-stature d'homme d'Etat.» Nicolas l'a surtout trouvé sympathique, «surtout quand il relevait que tout le monde l'attaquait». L'instituteur des quartiers Nord a aussi noté la promesse de payer les enseignants de REP+ 3 000 euros par mois. «Mais quand je suis allé voir sur son site ce matin, j'ai vu qu'en fait, c'est 3 000 euros sur l'année, déchante-t-il. Quand tu additionnes toutes les primes que l'on a déjà, ça ne fait jamais que 50 euros de plus par mois… Ce qui serait bien, dans ces débats, c'est qu'il y ait des spécialistes de chaque sujet pour leur dire quand ils racontent n'importe quoi !» Le vestiaire finit par se mettre d'accord : match nul, avec des compétiteurs qui ne sont pas au niveau. «Quand je les compare à Obama… souffle Gilles, y en a aucun qui peut casser la baraque.»