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Libération
La campagne côté droite

Des slogans, cris de guerre

Edouard Philippe, ici le 11 mai au Havre. (Photo : Charly Triballeau. AFP)
publié le 5 avril 2017 à 19h46

Chaque jeudi, Edouard Philippe, député et maire LR du Havre, proche d’Alain Juppé, chronique la campagne présidentielle pour Libération.

Slogan, c’est un vieux mot écossais qui veut dire «cri de guerre». En Ecosse, dès la fin du Moyen Age, chaque clan avait son tartan et son slogan, ce qui laisse à penser que, chez notre plus vieil allié, le choix de l’étoffe et le cri de ralliement participaient déjà à définir l’identité profonde de ceux qui partaient au combat.

Aujourd’hui, dans les grandes démocraties occidentales, les partis ont presque succédé aux clans, le gris uniforme des costumes a remplacé les tartans, les champs de bataille ont laissé la place aux espaces publicitaires, mais les slogans demeurent. La communication politique, fille naturelle du croisement improbable entre le marketing le plus acéré et le débat d’idées le plus appauvri, s’est jetée avec avidité sur cette possibilité de résumer en une formule bien sentie à la fois un candidat, sa posture et son programme.

Avec le temps, certains de ces slogans politiques se sont imposés, au même titre que d'autres slogans utilisés pour des produits ou des marques commerciales. Il est d'ailleurs troublant de constater combien les slogans politiques et commerciaux pourraient facilement être échangés. «Parce que le monde bouge» pourrait aussi bien être le cri de ralliement de Macron que celui du CIC. «Le contrat de confiance» de Darty fait rêver tous les candidats à toutes les élections. «Tous unis contre la vie chère» pourrait indifféremment s'appliquer à Intermarché et à Nathalie Arthaud. Benoît Hamon, qui veut faire battre le cœur de la France (il ne battrait plus ?), aurait pu aussi affirmer, avec la Macif, combien «la solidarité est une force». Et on imagine assez bien Jean Lassalle plaider, avec son accent roulant et sa voix de stentor, comme Herta, pour «le goût des choses simples»… Enfin, on peut se réjouir, en tout cas c'est mon cas, que s'agissant d'Asselineau comme pour Lapeyre, «il y en pas deux». Tous pensent, in petto en tout cas, que l'Elysée leur est promis «parce que je le vaux bien».

Ne mésestimons pas toutefois la portée des slogans politiques. La «force tranquille» de Mitterrand ou le «Ensemble tout devient possible» de Sarkozy définissaient parfaitement ce que voulaient incarner les futurs présidents et sont restés comme des marqueurs. Et les changements de slogans disent beaucoup des transformations que connaît une campagne : on a vu Valls, pendant la primaire de la gauche, passer du biscornu et un peu torturé «Faire gagner tout ce qui nous rassemble» à «Une République forte, une France juste» qui lui allait quand même beaucoup mieux au teint. Cela n'a pas suffi. Il n'est évidemment pas innocent que «Le courage de la vérité» de François Fillon ait cédé la place à «Une volonté pour la France». Cela suffira-t-il pour que, comme le dirait Leroy Merlin, «vos envies prennent vie» ?