Tous les samedis, un représentant de la société civile chronique la présidentielle. Ce week-end, Nicolas Hulot, président de la Fondation pour la nature et l’homme, décrypte deux enjeux de la transition énergétique sur lesquels les candidats devraient se prononcer.
Le récent tour de passe-passe autour de la fermeture de la centrale nucléaire de Fessenheim est révélateur de l’impasse dans laquelle risque de s’engager la transition énergétique. Quelle que soit la qualité du magicien, personne ne peut plus masquer notre incapacité collective à aller de l’avant sans répondre à deux enjeux essentiels.
Le premier : comment concilier la fermeture nécessaire de sites industriels, centrales nucléaires ou thermiques, avec l’aspiration légitime des salariés à conserver leur emploi ? Revenons en arrière… 2012, le gouvernement nouvellement élu organise un grand débat national préfigurateur de la loi de transition énergétique pour la croissance verte qui sera finalement votée en 2015. La loi retient des objectifs forts, parmi lesquels la baisse de 75 % à 50 % d’électricité d’origine nucléaire en 2025, et acte toute une série de dispositions pour accélérer la transition. Mais malgré son ambition, cette grande loi ne propose pas de solutions à cette préoccupation majeure qui a agité une année durant le débat entre organisations patronales, syndicales et environnementales et les collectivités locales. Pourtant, des solutions existent. C’est notamment l’objet d’un livre coécrit par Pascal Canfin et Laurent Berger avec une proposition simple : créer des contrats territoriaux de transition écologique entre filières. En effet, ce sont des centaines de milliers d’emplois locaux qui vont se créer, dans les prochaines années, dans les secteurs de l’énergie, du bâtiment, des services… D’autres expérimentations sont en cours et font leurs preuves, par exemple autour des «CV de site» qui permettent de proposer des solutions de replacement à des équipes complètes de salariés pour plus d’efficacité.
Second enjeu phare du prochain quinquennat : repositionner EDF, opérateur énergétique majeur, dans une trajectoire compatible avec celle de la transition énergétique. Problèmes industriels, pertes de compétences, risques sur la sûreté nucléaire, fragilité financière, cette entreprise chère aux Français apparaît de plus en plus comme un colosse aux pieds d’argile à l’avenir incertain. Alors que partout ailleurs la transition énergétique s’accélère, EDF se rapproche d’Areva, surinvestit dans des projets nucléaires coûteux comme Hinkley Point (Royaume-Uni) et n’investit pas suffisamment dans les énergies renouvelables. Voilà deux questions sur lesquelles les candidats devraient être tenus de s’exprimer plus clairement avant le 23 avril.