Chaque vendredi, Thierry Mandon, secrétaire d’Etat à l’Enseignement supérieur, chronique la campagne électorale.
Epilogue : «Conclusion, ce qui termine une action longue et compliquée.» Pour avoir été d'une brutalité inédite, le débat de mercredi n'en a pas moins illustré les principaux enseignements de la campagne.
Le chamboule-tout d’abord. Des primaires à la configuration sans précédent d’un second tour dont ont disparu les partis traditionnels, cette présidentielle aura mis à terre tous les totems. Dans un paysage politique vidé de ses visages habituels et de ses repères partisans séculaires, il faut rompre pour émerger. Plus que le «dégagisme», monstre sémantique qui dévore jusqu’à son géniteur, le vocabulaire «révolutionnaire» fut la clé du succès. Dès lundi matin, la question essentielle sera de savoir quand s’arrêtera ce jeu de massacre.
Le «moment post-libéral» ensuite. Commencée par une ode au libéralisme dur qui a porté le très large succès de François Fillon dans sa primaire, la campagne a progressivement - et heureusement - évolué vers des thématiques de protection collective, de rôle de l’Etat et de maîtrise plus démocratique des institutions internationales. Dans le débat de mercredi, disparus les plaidoyers pour l’entrepreneuriat individuel pour tous. On parle désormais politiques publiques, droits nouveaux, services publics. Ces attentes de la société se sont imposées. Elles sont les termes clairs du mandat qui liera la nation à son futur président. S’en délier sera trahir.
Ce que l’on retiendra enfin - et surtout - de la violence du choc voulu par Marine Le Pen, c’est la volonté de séparer les Français, de choisir les siens, et de rendre les écarts irréductibles. La «société dissociée» est une réalité visible par tous. Jamais les écarts entre plusieurs France n’ont paru aussi grands, les sentiments de peur ou d’espoir dans l’avenir si contrastés selon les conditions sociales, les territoires voire les identités. Mais, pour la première fois dans une élection présidentielle, d’autres grands candidats font le choix de capitaliser sur ces fractures en espérant y enfermer «leurs» électeurs. Triste Jean-Luc Mélenchon, dont le ni-ni n’est qu’un moyen d’espérer conserver pour lui ses insoumis en les dissuadant de rejoindre pour un tour le camp des républicains. Ça ne marchera pas.
On ne jouera pas avec la République dimanche ; elle doit être plébiscitée en votant Emmanuel Macron. Mais on le fera comme une exigence pour l’action, convaincus que la promesse républicaine s’estompe pour de trop nombreux Français. La campagne vue de gauche ? Besoin d’une gauche renouvelée dans ses idées, ses projets, ses hommes et ses femmes. Vivement demain.