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Libération
Interview

Jean Garrigues, historien : «Il va avoir du mal à susciter une adhésion populaire»

publié le 7 mai 2017 à 22h16

Historien spécialiste de l'histoire politique contemporaine, auteur de Présidents, au cœur du pouvoir (Le Faune éditions, 2016), Jean Garrigues observe une dévaluation de la fonction présidentielle depuis le second mandat de François Mitterrand. Il avait appelé, avec d'autres historiens, à voter Emmanuel Macron pour sauvegarder le pacte républicain.

«Quel président sera-t-il ? C'est la question qui se pose. Il a montré, notamment dans le débat face à Marine Le Pen, des qualités de calme, de compétence et de pugnacité. Maintenant, sa campagne a manqué de souffle. Un souffle qu'il doit désormais donner à sa présidence, et très vite. La notion d'état de grâce n'existe plus. Il a laissé entendre qu'il ne serait ni un hyper-président à la manière de Sarkozy, confondant les rôles du président de la République et du Premier ministre, ni le président "normal" voulu par François Hollande. Il est donc dans une recherche d'équilibre entre la verticalité propre à la Ve République et l'horizontalité que réclame l'époque à travers une démocratie participative. Il a trouvé cet équilibre avec En marche, saura-t-il le trouver comme président de la République ?

«Emmanuel Macron se retrouve dans la position d'un Pierre Mendès France, qu'il a invoqué au cours de sa campagne et qui, en 1954, voulait bousculer le système des partis, parvenant à créer un souffle que l'on appellera "le mendésisme" et à obtenir une popularité, avant d'être finalement défait par les partis. On peut aussi comparer Emmanuel Macron à Valéry Giscard d'Estaing, qui était parvenu en 1974 à se faire élire en écartant les gaullistes et la gauche. Mais, comme disait le général de Gaulle, "son problème, c'est le peuple". Pierre Mendès France et VGE étaient dans la transgression, mais finalement, ni l'un ni l'autre ne sont parvenus à s'installer dans la durée.

Macron va-t-il susciter une adhésion populaire ? C’est le défi des semaines à venir, alors que se profilent les élections législatives. Cela va être compliqué, puisqu’il se retrouve tout de suite pris entre deux fronts qui ont obtenu l’adhésion des masses populaires : le France insoumise d’un côté et le FN de l’autre.»