On dit parfois que les Français ne s'intéressent plus à la vie politique. Eclatant démenti : ils étaient quelque 19 000 à briguer une investiture du mouvement En marche pour 577 candidatures. Un engouement digne de la Star Ac ou de The Voice… Les partis traditionnels se gaussent ou se méfient, mais si les macroniens réussissent leur coup - obtenir une majorité en juin - ce sera le plus grand coup de balai pratiqué au Parlement depuis le début de la Ve République. Une moitié de candidats sans passé d'élu, une moitié de femmes, un éventail professionnel plutôt large, quelques têtes connues pour pimenter la liste, comme les juges Eric Halphen ou Laurence Vichnievsky, le conseiller de l'Elysée Gaspard Gantzer, la torera Marie Sara, le mathématicien médaille Field Cédric Villani… Le renouveau est indiscutable. Reste à savoir si cette métamorphose du personnel politique changera les institutions. Ces néophytes jetteront à coup sûr un regard neuf sur les procédures, les mœurs parlementaires et les coutumes électorales. Mais l'appel à la «société civile», rituel depuis une ou deux décennies, n'a pas toujours donné des résultats concluants. Cette fois, on puise dans la culture «start-up», qu'il s'agisse des origines du mouvement, que nous décrivons dans notre enquête (lire pages 6-8), avec une escouade de financiers obligeants, ou bien pour trier un bataillon de candidats selon des critères très managériaux. Avec ce risque supplémentaire : sans tradition partisane, sans courant derrière eux, entièrement dépendants de l'appareil naissant d'En marche, dévoués au nouveau président à qui ils devront tout, les députés nouveaux devront éviter un ancien syndrome : celui du groupe parlementaire uniforme et domestiqué, qu'on a connu à différentes reprises depuis 1958. On peut être chaussé de neuf et rester, par la force des choses, une troupe de godillots.
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