Le cas Ferrand, premier stress-test de la machine En marche ? Si le gouvernement et la garde rapprochée d'Emmanuel Macron serrent les rangs (et les dents) alors que le premier disciple du macronisme, désormais ministre, se voit accusé de mélange des genres, à la périphérie du mouvement, on s'interroge. Daniel Cohn-Bendit, rallié à Macron fin février, revient sur la «situation difficile» du ministre de la Cohésion des territoires.
A lire aussi L'affaire Ferrand en trois questions
De quoi «l’affaire Ferrand» est-elle symptomatique?
Si l'on veut, ce que cette histoire reflète, c'est le problème de la classe politique française tout entière, tous partis confondus. Les politiques sont comme des chats : ils ont plusieurs vies. Et là, c'est la vie d'élu socialiste et de notable régional qui rattrape Richard Ferrand. Et plus particulièrement ces pratiques de notable, quelle que soit l'étiquette, qui ont une intelligence d'utilisation de leur statut pour faciliter, disons, des affaires personnelles… Ces histoires sont toujours délicates, comment trancher entre le légal et le moralement discutable? Ça a toujours été comme ça, on le retrouve à tous les niveaux, du local au national, et c'est un problème. Moraliser tout cela, ça va mettre du temps…
Ce que vous dites, en somme, c’est qu’il est compliqué de faire advenir un «nouveau monde» avec les représentants de l’ancien…
Oui, mais on ne fait pas le nouveau monde sans l'ancien monde… Si on détruit tout, si on décapite les élites, on a l'Irak, les Etats faillis ! J'exagère, mais c'est l'idée. Pour ce qui est de Richard Ferrand, si j'avais quelque chose à suggérer à Emmanuel Macron – et je ne suis pas objectivement dans cette situation – je dirais que le mieux pour le moment c'est que Richard Ferrand démissionne en tant que ministre, et qu'il tente sa chance en tant que député. Vu l'ampleur de ce que veut faire Macron il serait préférable que Ferrand le protège ainsi en se plaçant devant les électeurs. Et pour la suite on verra. J'ai cependant parfaitement conscience de la difficulté d'une telle décision : d'une part parce que Ferrand n'est plus l'homme qu'il était il y a dix ans, certainement, et qu'il a témoigné à En marche une grande loyauté et un grand dévouement.