«Le brouillard va se dissiper plus vite que vous croyez.» Dimanche, Jean-Christophe Cambadélis, encore patron du PS, a tenté de rassurer des militants après une catastrophe présidentielle (6,4 %) et une débâcle législative (7,4 %). Si le PS sait maintenant à quoi s'en tenir à l'Assemblée, le «brouillard» entoure toujours l'avenir d'une formation politique en fin de cycle.
Certes, la bonne tournure du scrutin permet aux socialistes de compter 30 députés au Palais-Bourbon. Quelques alliés radicaux, un écologiste et une poignée d'ultramarins pourraient même gonfler un groupe parlementaire dirigé par le député de Seine-et-Marne, Olivier Faure, candidat à sa succession. On pensait avoir des socialistes pro-Macron épargnés par le nouveau président, prêts à jouer les satellites, mais les deux tiers du groupe, vainqueurs de candidats LREM, voudront au contraire se distinguer pour «réaffirmer l'identité socialiste», dit un rescapé. «On ne doit notre élection à personne, ajoute un autre. Notre ligne sera "ni Mélenchon ni Macron".» A voir. Car dans un communiqué, publié lundi, les députés PS jouent l'ambiguité, annonçant qu'ils seront des «alliés vigilants de la majorité», mobilisés «pour la réussite du quinquennat». Même s'ils s'abstiendront lors du vote de confiance au gouvernement Philippe, début juillet. Un début de tiraillement avec le parti ? La direction du PS, elle, pousse pour un «vote clair», issu du conseil national convoqué samedi. «Il faut que le premier acte de la refondation se fasse dans la distinction avec Macron. On va dire que nous ne sommes pas dans la majorité et que nous ne voterons pas la confiance», annonce un responsable du parti, pour qui l'arrivée de socialistes très critiques envers Macron dans le groupe PS «embête beaucoup Valls».
Car avant d'être élu ric-rac dans un climat explosif dans l'Essonne (lire page 10-11), l'ex-Premier ministre a passé la semaine à appeler les «Macron-compatibles» et des candidats LREM, voire Modem. «Ce qu'il a en tête, c'est la constitution d'un groupe qui ferait scission du PS, une sorte de poste avancé pour accueillir ceux qui ont l'intention de voter la confiance», confirme un proche. «Après sa réélection brillante, pas sûr que beaucoup de députés le suivent où que ce soit», rétorque un député.
Réuni ce mardi matin, le bureau national du PS doit poser les premières bases de la ligne politique des socialistes pour les six prochains mois. Evoquer aussi l'avenir sans Cambadélis, qui a annoncé dimanche la constitution d'une «direction collective». Comment ? Avec qui ? Pour quelle durée ? «Brouillard»là aussi… Lequel ne devrait pas se dissiper avant quelques semaines. «C'est le principe du triumvirat, fait remarquer un député. Quand aucun empereur ne s'impose, on en met trois.» Chez les socialistes, ils seront beaucoup plus. Et si les consultations en coulisses vont bon train, aucun dirigeant n'a, pour l'instant, revendiqué la succession de Cambadélis. Beaucoup s'accommodent d'une direction collégiale et d'un congrès repoussé. D'ordinaire, les lendemains électoraux sont le théâtre d'offensives éclairs. Pas au PS, pour l'instant : «Pour s'engager dans une guerre de mouvement, encore faut-il avoir des troupes et des soldats intrépides, fait remarquer l'eurodéputé Emmanuel Maurel. Là, on va d'abord panser nos plaies avant d'y retourner.»