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Libération
Éditorial

A Emmanuel Macron, la providence souriante

(Photo Laurent Troude pour Libération)
publié le 23 juin 2017 à 20h16

Quand on proposait à Bonaparte la promotion d'un général, il répondait (citation peut-être apocryphe) : «Je vois bien les qualités de ce général. Mais a-t-il de la chance ?» A l'aune d'un tel critère, Emmanuel Macron aurait vite été maréchal d'Empire. Le new boy de l'Europe, selon l'expression de Viktor Orbán, le Premier ministre hongrois, arrive dans une conjoncture soudain favorable. Certes sa jeunesse, son expression simple et ouverte et ses convictions européennes ont tout pour plaire aux dirigeants de l'Union, qui voient en lui une sorte de saint Michel terrassant le dragon populiste.

Dominant une campagne présidentielle éclair, il a forcé sa chance, à tout le moins. Mais rarement conjonction des astres fut plus favorable. Effrayée par la montée des nationalismes, l’Union européenne, pour la première fois depuis de longues années, semble prête à un sursaut. Le Brexit y est pour beaucoup, qui a démontré que ce qui avait été fait par trois générations pouvait se défaire en un seul vote. Donald Trump aussi. Par sa brutalité fantasque, il a fait comprendre aux Européens qu’ils devaient surtout compter sur eux-mêmes. Le risque de retrait américain justifie tout à coup des efforts communs en matière de défense. Ainsi le discours traditionnel de la France sur l’Union, plus volontariste, rencontre un écho qu’il n’avait pas eu depuis longtemps.

A cela s’ajoutent les bonnes nouvelles économiques. La croissance au premier semestre vient d’être réévaluée à 0,5 %, ce qui rapproche la France des performances (encore modestes…) réalisées en Europe. Ce qui augure surtout d’une diminution lente mais continue du chômage dans les prochains mois. Sarkozy et Hollande avaient dû vivre avec le supplice chinois des chiffres du chômage, chaque mois un peu plus mauvais. La courbe s’est inversée : chaque mois, les choses iront un peu moins mal, ce qui change du tout au tout le paysage psychologique dans lequel le gouvernement évoluera.

François Hollande peut se dire, avec un brin d’amertume, que la même inversion survenue un peu plus tôt lui aurait permis de rétablir son image… Déniée à l’ancien président, elle est servie sur un plateau au nouveau. Meilleure conjoncture, relance de l’Europe, meilleur rayonnement international : qui peut se plaindre de voir la situation se rétablir progressivement ? A celui qui se réclame de Jeanne d’Arc, la providence est décidément bonne fille.