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Libération
La lettre politique

Le parler faux de Wauquiez

Laurent Wauquiez, mardi sur BFM TV. (Photo AFP. BFM TV)
publié le 21 février 2018 à 18h43

Laurent Wauquiez, donc, assume. Il préfère la persistance à la pénitence, la confirmation à la contrition. Son pari n’est pas forcément perdu, tant il est de bon ton de dénigrer la «bien-pensance». Mais il mesure aussi la dégradation subie par le débat public en France. A y regarder d’un peu plus près, son intervention sur BFM, présentée à l’enseigne de la franchise décapante, est un modèle de mauvaise foi insidieuse.

Sur BFM, il veut rompre avec le «bullshit», pratiqué par les autres responsables politiques. Les autres jouent la comédie, lui parle vrai et cru. L'ennui, c'est que devant ses étudiants, il ne désignait pas les autres… mais lui-même. Rappelons sa phrase exacte : pas de fuites, dit-il aux étudiants, «parce que sinon, […] ce que je vais vous sortir sera juste le bullshit que je peux sortir sur un plateau médiatique». On ne saurait être plus clair. Devant les étudiants, il dit la vérité, à la télé, il ment. Mais mardi soir, la version a changé : ce sont les autres qui font du «bullshit». Drôle de manière «d'assumer».

Double langage

Même chose pour Darmanin. A BFM, Wauquiez explique qu'il a demandé sa démission depuis longtemps, non sur la base d'éléments factuels, dont il reconnaît tout ignorer, mais par principe : un ministre mis en cause doit se retirer. Autre chanson devant les étudiants : Darmanin, a-t-il asséné, c'est «Cahuzac puissance dix» ; autrement dit, il est évidemment coupable. Double langage, donc.

Même édulcoration rhétorique dans l’affaire Sarkozy. Là encore, l’accusation est énorme : le président de la République, dit-il, faisait écouter ses propres ministres ! Si la chose est vraie, c’est une affaire d’Etat, qu’il aurait dû dénoncer depuis longtemps. Si elle est fausse, comme Wauquiez le laisse entendre mardi soir, c’est une pure calomnie.

S’il y avait encore une vague déontologie dans le débat public, Wauquiez, pour avoir reconnu qu’il mentait systématiquement à la télévision, pour avoir déclaré coupable un ministre qui est seulement mis en cause et pour avoir calomnié un ancien président de la République, devrait démissionner.