La méthode se veut souple, les objectifs sont intangibles. Confronté jeudi à une large mobilisation de la fonction publique, et à partir de début avril à une grève de la SCNF, l'exécutif tente de concilier fermeté et refus du bras de fer. «Il ne faut pas mollir», a lancé Edouard Philippe, mardi soir, dans un chat vidéo diffusé sur sa page Facebook. Tout en assurant ne pas se placer «dans la perspective de la grève» vis-à-vis des cheminots : «J'ai bien entendu qu'elle est annoncée, mais on est en pleine concertation, il y a énormément de choses à discuter.» Dans un courrier adressé mardi aux syndicats, la ministre des transports, Elisabeth Borne, les invite à présenter «très prochainement» des «projets alternatifs» à celui du gouvernement. Un dialogue corseté, tenu par un calendrier serré et par les ordonnances que prendrait l'exécutif en cas d'échec des discussions.
Après la relative faiblesse de la mobilisation contre la loi travail, à l'automne 2017, l'exécutif juge que l'opposition syndicale n'a pas reconstitué ses forces. «A priori, il n'y aura pas plus de printemps social qu'il n'y a eu d'automne social», estime un conseiller présidentiel. Comme sur son tour de vis migratoire, le gouvernement compte aussi sur le soutien de l'opinion publique, au moins dans les premiers temps du conflit. «La grève deux jours sur cinq, c'est un vrai supplice chinois pour les gens, ça passera très mal dans le privé», juge un parlementaire LREM. «Il y a encore dans l'opinion une vraie bienveillance à l'égard d'Emmanuel Macron», veut croire la députée Aurore Bergé.
Comité d’experts
Côté fonction publique, l'exécutif a avancé à la mi-juin un rendez-vous salarial avec les syndicats, initialement prévu pour l'automne. Mais, pour des raisons de calendrier budgétaire, cette rencontre ne devrait donner lieu à aucune annonce. En parallèle, le gouvernement projette toujours un «big-bang» de la fonction publique, notamment à partir des conclusions du comité d'experts Action publique 2022. Attendues dans les prochaines semaines, celles-ci viseront notamment une baisse des dépenses publiques. Toutefois, alors que la lettre de mission du comité évoquait de possibles «abandons de mission» par l'Etat, «on ne devrait pas aller très loin dans ce sens», assure prudemment une source ministérielle.
Plus que le mécontentement du public, c'est la «grogne fiscale», notamment chez les retraités, que semble surveiller de près l'exécutif. Edouard Philippe a annoncé mardi que 100 000 d'entre eux seraient exonérés en 2019 de la hausse de la CSG. Le Premier ministre n'a pas non plus écarté un retour de la demi-part fiscale des veuves. Matignon a en revanche écarté toute modulation de la taxe foncière en fonction des revenus ainsi que toute remise en cause du quotient familial, contrairement à une proposition du député LREM Guillaume Chiche.