Dans le hall d'accueil, Nathalie Appéré prend le bras de Stéphane Troussel. Elle le touche, rigole. La maire de Rennes glisse avec une touche d'humour : «Je trouve que ce congrès est très sensuel. On se touche pour se prouver qu'on existe encore, que nous sommes encore présents, encore vivants. Et ça fait du bien de voir qu'il reste encore un peu de monde.» Une manière comme une autre de se rassurer. Samedi après-midi, on s'est pointé au congrès du PS, à Aubervilliers, afin d'observer, d'un peu plus près, un parti qui court après sa seconde vie. Rachid Temal, qui a géré la boutique ses huit derniers mois, ne joue pas les fiers, mais il laisse paraître une petite pointe d'optimisme. «Après les législatives, tout le monde nous voyait mort, aujourd'hui on regarde vers l'avenir et c'est déjà une petite victoire», dit-il.
Dans les couloirs, le hall ou la salle plénière, on croise rarement des rêveurs. Certaines formules reviennent en boucle. Du genre, «ça va être dur», «le chemin sera long», «nous devons définir ce que nous sommes avant de s'imaginer revenir au pouvoir». Discret ses derniers mois, Christian Paul est dans les parages. Il fait dans l'humour : «Alors, ça fait quoi d'assister au congrès du sixième parti du pays?» Pour l'ancien député et chef de bande des frondeurs, l'avenir ne sera pas simple: le PS devra ouvrir ses portes, s'adresser à toutes les forces de gauche, débattre, «on ne pourra survivre si on reste à huis clos», conclut-il.
Le député des Landes, Boris Vallaud est posé dans le hall, il discute avec une journaliste et, en même temps, écoute d'une oreille le discours de Pierre Moscovici sur l'Europe. Soudain, le commissaire européen glisse avant une phrase : «Comme l'a dit ce matin Boris Vallaud…» Le député des Landes l'écoute, fait les gros yeux et lâche : «Mais je n'ai jamais dit ça moi !» Un peu plus tard, on le retrouve à la même place. Une militante passe, les yeux trempés. Elle replonge dans les souvenirs. Puis : «Il nous manque Emmanuelli, vous l'imaginez à la tribune?» Boris Vallaud, qui vit son premier congrès avec l'étiquette d'élu sur le front, acquiesce. «Depuis ce matin, aucun militant ne m'a dit que ça allait être facile, il y a une forme de lucidité», explique Vallaud. Selon lui, le parti pourra se relever si chacun retrousse ses manches : du simple militant à la tête d'affiche.
La folie est venue du passé. L'ancien ministre de Mitterrand, Louis Mexandeau, 87 ans monte sur scène. Chemise à rayure, cravate. Louis Mexandeau a participé à tous les congrès depuis celui d'Epinay en 71, une éternité. Tout long de son discours, il retrace les victoires, les défaites et les personnalités (Mitterrand, Blum, Jospin…). Il lance sous les applaudissements : «Le Parti socialiste est un rempart solide ancré dans l'histoire de France.» Toute la salle se lève, près de mille âmes. Une surprise. Installé au premier rang, Oliver Faure grimpe sur scène - ce n'était pas au programme - pour le remercier. Le nouveau chef promet des jours meilleurs au PS. L'image peut-être vue de plusieurs manières :une passation de pouvoir entre deux générations ou un parti qui frémit grâce à ses gloires du passé.