«Il était temps de le refaire. C'est important de pouvoir se rencontrer et de débattre», assure Jean-Jacques, un militant venu d'Alsace. Le Parti socialiste (PS) a fait vendredi son retour à La Rochelle, quatre ans après y avoir organisé sa dernière université d'été. Campus19, c'est le nouveau nom donné à ce rassemblement ouvert aux militantes et militants socialistes mais aussi aux citoyennes et citoyens. «2 000 participants» sont attendus pour le week-end selon Pierre Jouvet, un des porte-parole du parti, qui compte «50 000 militants à jour de leur cotisation».
Sous un ciel bleu, les accolades se multiplient entre les militants devant la halle de l'espace Encan où ont lieu des débats dans chaque atelier. Paul, 30 ans, entrepreneur dans la restauration et adhérent au PS depuis 2014, retrouve Jean-Jacques, 77 ans. «On est là pour la préparation des municipales, il ne faut pas se mentir», confie Paul. Son constat est sévère sur les échecs électoraux du parti depuis la dernière élection présidentielle : «Le parti a fait de la merde avec 6% lors des élections européennes. Depuis nous n'avons pas vraiment fait le bilan. Il ne peut pas être fait car Cazeneuve va faire sa rentrée à Montpellier et il ne faut pas le plomber. Si on communique trop sur les erreurs faites, on décrédibilise la personne.» Concernant l'éventuel retour sur le devant de la scène d'anciennes figures du parti, Jean-Jacques ajoute : «Une femme et un homme politique ne sont vraiment morts qu'avec une pierre tombale sur le dos.»
Faible écho de la parole des socialistes
Ce retraité estime que «Cazeneuve n'a pas démérité» lors du quinquennat de François Hollande mais pour lui, «Taubira, c'est l'honneur de la gauche. Elle a la même aura que Robert Badinter». Il regrette qu'elle n'ait jamais été adhérente au PS. Antoine, 27 ans aimerait voir Martine Aubry à La Rochelle mais il ne pense pas qu'elle viendra. Ce jeune militant a fait campagne pour soutenir la candidature de la maire de Lille lors de la primaire PS en 2011 face à François Hollande : «C'est une femme de convictions. Elle a permis de réduire le chômage en appliquant des mesures de gauche.» A ses côtés, Liliah, 18 ans, militante à Strasbourg, est heureuse de participer pour la première fois à l'université d'été du parti malgré la fatigue : «J'ai pris le train à 5 heures du matin pour être ici. Ça m'a fait neuf heures de train et je n'ai pas dormi. L'ambiance est cool. On revoit des gens que l'on a rencontrés lors de meetings à Paris.» Cette future étudiante en droit a tracté sur des marchés lors de la campagne des européennes : «L'écologie et le socialisme c'est fondamental. Concernant l'écologie, on s'en est rendu compte un peu tard.» Quant au faible écho de la parole des socialistes dans le débat public, Liliah préfère en rire : «Ma prof d'histoire voulait prendre le PS comme exemple lors d'un cours. Puis elle a effacé le mot du tableau en disant ironiquement "ça n'existe plus".»
Selon une jeune militante, le Campus19 est l'occasion de «voir les élus et de dépasser la barrière de l'âge». Michèle, 81 ans, s'est assise le temps d'un apéritif. Adhérente au PS depuis trente-cinq ans et venue à l'université d'été de La Rochelle pour la dernière fois en 2014, elle «pense à ceux qui ne sont plus là». Cette habitante du XVIe arrondissement parisien raconte avoir voté pour Emmanuel Macron au premier et au second tour de la présidentielle car elle estimait que Benoît Hamon n'était pas en capacité de rassembler suffisamment la gauche et le centre : «Je considère que je me suis fait baiser. La seule chose de gauche qu'il est en train de faire, c'est la PMA.» Une militante ajoute: «Et sur la question des réfugiés, des migrants, on ne peut pas dire qu'il soit de gauche.» Et une troisième militante, plus jeune, renchérit : «Oui enfin nous non plus nous n'avons rien fait à ce sujet.» «Oui c'est vrai», lui répondent-elles.
«Le PS a retenu la morale des européennes»
Dimitri, 18 ans, adhérent au PS depuis 2015 et animateur fédéral du Var est arrivé à La Rochelle dès jeudi soir. L'occasion de se retrouver entre jeunes du Mouvement des jeunes socialistes. Il commence déjà à ressentir le manque de sommeil : «Avec d'autres jeunes socialistes ont a pris un voilier hier soir et on a picolé. Ce soir, on va faire une soirée et on va dormir». Depuis les mauvais scores électoraux du parti, Dimitri fait le constat «qu'il y a de moins en moins d'ambitions personnelles au sein du parti et nous nous interrogeons plus sur le fond». Et il ajoute qu'«historiquement, les jeunes socialistes sont bien plus à gauche que le PS».
Au bar, Dominique bière à la main commande un jus de pomme pour son fils de 4 ans. Il n'est ni militant, ni adhérent au PS, et a voté pour la liste «Urgence écologie», conduite par Dominique Bourg lors des élections européennes. En vacances dans la cité, il est passé par curiosité écouter ce qu'il se dit. En lisant l'affiche du Campus19 sur laquelle est inscrite «Pour un avenir écologique et social», il commente avec humour : «Le PS a retenu la morale des élections européennes.» Mais selon lui, «il faut changer de système politique. Il faut une démocratie participative». Il ajoute en souriant : «Si on vivait les mots que l'on dit, cela changerait beaucoup de choses.»