Emmanuel Macron n'est jamais plus passionné, véhément et même radical que lorsqu'il s'exprime devant des instances internationales. Cela s'est encore vérifié mardi soir : devant les dirigeants du monde réunis pour l'assemblée générale des Nations unies, le président français n'y est pas allé par quatre chemins. Pour sauver la planète et limiter à moins de deux degrés le réchauffement climatique, il ne suffira pas de «réformer le système», il faudra carrément «le changer» en bannissant «le libre-échangisme».
Dans la bouche de ce libéral assumé qui avait fait de «la libération de la croissance» la priorité absolue de son gouvernement au début du quinquennat, le propos a de quoi surprendre. Ce n'est pourtant pas la première fois qu'il entreprend de secouer les grands de ce monde pour les sortir de leur torpeur. A Davos, début 2018, il invitait les patrons à s'engager pour un «nouveau contrat mondial» qui aurait pour ambition de redonner du sens à la mondialisation. Quelques semaines plus tard, devant les experts de l'OCDE, il se désolait de «la violence» d'une mondialisation qui creuse les inégalités, enrichissant «les nomades de ce monde», «au détriment des sédentaires».
«Incohérent ! Irresponsable !»
A New York mardi, Emmanuel Macron a reconnu que son message radicalement écolo pouvait paraître paradoxal. «Je ne suis pas en train de vous dire que tout va bien en France», a-t-il fait valoir, évoquant «ces produits qui conduisent à la déforestation» comme le soja ou l'huile de palme encore «trop souvent» importés dans l'Hexagone. Si Macron assume cette contradiction, c'est pour mieux démontrer que la solution passe par une coopération à l'échelle mondiale. Pour «changer les choses en profondeur», il faut convaincre un maximum d'Etats de s'engager sur la neutralité carbone en 2050, ce que se sont refusés à faire, dans l'UE, plusieurs Etats d'Europe de l'Est dont la Pologne. Il faut aussi que «les grands pays de ce monde arrêtent de financer des installations polluantes dans les pays en voie de développement». «C'est incohérent ! C'est irresponsable !» a tempêté Macron.
La solution ? Elle passe selon lui par toujours plus de «coopération» pour «changer notre organisation collective», changer aussi «nos habitudes de consommateurs, de producteurs, d'investisseurs et de gouvernement». S'il affirme toujours croire «à l'ouverture et au libre-échange», Macron précise qu'il ne peut désormais s'agir que «d'un libre-échange raisonné, capable d'intégrer les objectifs zéro carbone et zéro déforestation». Entre ceux qui s'enferment dans «la rhétorique de la dénonciation» – allusion implicite à la charge de la jeune Greta Thunberg à la même tribune vingt-quatre heures plus tôt – et ceux qui se complaisent dans «le confort de l'inaction et le cynisme», Emmanuel Macron revendique d'appartenir au groupe de ceux qui «essaient de faire».