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Chez Pol

«Le bruit et l'odeur» : Juppé plus chiraquien que Chirac lui-même

«C’était tout simplement la vérité» : quelques heures après la mort de l'ancien Président, Juppé a repris à son compte la phrase la plus polémique de la carrière de son mentor, qui l'avait pourtant regrettée après son départ de l'Elysée.
Jacques Chirac et Alain Juppé (à sa droite), respectivement président et secrétaire général du RPR visitent les laboratoires pharmaceutiques Fabre à Soual, près de Castres, en 1989. (Photo Georges Gobet. AFP)
publié le 27 septembre 2019 à 11h23

On ne saura jamais si Alain Juppé est, oui ou non, «le meilleur d'entre nous». Il est en tout cas très certainement le plus fidèle d'entre tous les chiraquiens. «Je ne lui ai jamais failli, il ne m'a jamais failli», disait le maire de Bordeaux au Monde en 2016 à propos de son mentor, décédé jeudi. Juppé l'avait déjà prouvé en assumant toute sa part (et peut-être un peu plus) dans l'affaire des emplois fictifs de la mairie de Paris. Il l'a encore prouvé jeudi soir sur BFMTV en allant justifier, vingt-huit ans après, la sortie la plus polémique du «Chi». Celle, évidemment, sur «le bruit et l'odeur».

«C'était tout simplement la vérité, a défendu l'ancien Premier ministre. J'ai été élu de ce quartier [la Goutte-d'Or à Paris, ndlr] et j'ai fait la même constatation. Est-ce que ça veut dire qu'on est racistes ? […] Lui faire un procès en racisme, non. En revanche, pas d'angélisme. Il y a des situations objectives, qui ne sont pas liées à la race naturellement, qui n'ont rien à voir avec ça, mais qui sont difficiles et c'est pour ça qu'on a essayé d'agir dans ce quartier.» Et Juppé de conclure, droit dans son chiraquisme : «Il l'a dit, j'aurais peut-être pu le dire, voilà.»

On notera toutefois que Chirac lui-même avait reconnu qu'il n'aurait peut-être pas dû le dire, en 2009 sur Europe 1, regrettant : «Dans une vie politique, on n'évite pas de dire des bêtises de temps en temps. […] C'était un propos malheureux que je n'aurais pas reproduit, qui m'est venu spontanément. C'était une bêtise.» Son fils spirituel était sans doute passé à côté de ce mea culpa tardif.

Pour mémoire, le 19 juin 1991 à Orléans, le président du RPR et maire de Paris d'alors avait déclaré : «Le travailleur qui habite à la Goutte-d'Or et travaille avec sa femme pour gagner environ 15 000 francs. […] Sur son palier d'HLM, ledit travailleur voit une famille entassée avec le père de famille, trois ou quatre épouses et une vingtaine de gosses, qui touche 50 000 francs de prestations sociales sans, naturellement, travailler. […] Si vous ajoutez à cela le bruit et l'odeur, le travailleur français, sur le palier, il devient fou. Ce n'est pas être raciste que de dire cela.»