Voyez comme je suis proche de vous, de vos territoires et de vos préoccupations du quotidien. Tel est, en substance, le message qu'Emmanuel Macron voulait encore faire passer vendredi soir, alors qu'il célébrait à Clermont-Ferrand le centenaire du quotidien local, La Montagne. En présence de nombreux élus locaux, cette cérémonie lui offrait une nouvelle occasion de donner à voir la métamorphose de l'acte II. Les gilets jaunes et le grand débat sont passés par là. Enarque, ancien banquier d'affaire, le Macron de l'acte I a pu être décrit comme le président de la «start-up nation», rejeton déconnecté des élites mondialisées. Plus à son aise dans les studios de CNN ou à la une des grands médias internationaux que dans les sous-préfectures.
Le Macron II, bien au contraire, ne serait qu'écoute et bienveillance. Il revendique ses origines provinciales. Et ne lasse pas de débattre : jeudi soir à Rodez (Aveyron) sur les retraites pendant trois heures, vendredi matin à Cournon-d'Auvergne où il s'est attardé cinq heures au Salon de l'élevage et encore le soir à Clermont-Ferrand où il s'est exprimé sur la presse devant les salariés de La Montagne et leurs invités. De ce journal «ancré à gauche» mais dont le «vrai parti» serait «la République», il estime qu'il participe à la création d'un «sentiment d'appartenance» et d'avoir «façonné l'art d'être Auvergnat».
Dans «le fracas permanent» des réseaux sociaux et de l'info en continu, Macron estime que les journalistes – qu'il assume d'avoir tenus à distance au début de son quinquennat au nom du refus de toute «connivence» – sont d'irremplaçable «tiers de confiance». Au passage, il a promis de se battre aux côtés des éditeurs, pour faire comprendre à l'américain Google qu'il ne peut pas «s'affranchir» de la loi française et de la directive européenne qui impose des droits d'auteur aux plateformes de diffusions d'information en ligne. Google réclame l'utilisation gratuite des contenus des journaux sous peine de les déréférencer.
«Remettre des fonctionnaires dans chaque canton»
Mais c'est surtout la presse régionale, «plus ancrée dans les territoires» et «moins orientés politiquement» que Macron voulait célébrer. Selon l'Elysée, cette presse aurait vocation à jouer «un rôle fondamental» pour expliquer aux Français la politique gouvernementale. C'est pourquoi le chef de l'Etat avait tenu à confier à La Dépêche, autre grand titre de la presse régionale, l'organisation du débat sur les retraites devant près de 500 lecteurs réunis à Rodez. A Clermont-Ferrand, l'échange avec les invités de La Montagne était une nouvelle occasion de célébrer les territoires. Interpellé par un maire de la Nièvre désolé que l'Etat ferme des services publics, le locataire de l'Elysée lui a bien volontiers donné raison : «On ne doit plus faire d'économies dans les territoires. Il faut donner plus de pouvoir au local et remettre des fonctionnaires dans chaque canton.»
Spectateur amusé de ce mea culpa, l'eurodéputé LR Brice Hortefeux, n'a pas été totalement convaincu. Il veut bien saluer les méritoires efforts du jeune président qui semble entreprendre de «faire du Chirac». Mais au terme de cette journée auvergnate, le plus sarkozyste des Auvergnats note que cette ode à la proximité ne sonne tout à fait juste : «C'était sans incident, mais aussi sans relief et sans chaleur» constatait-il en fin de soirée.