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Libération
Municipales à Paris

Griveaux démarche à droite pendant qu'Hidalgo rassemble à gauche

Le candidat LREM a annoncé plusieurs têtes de listes lors d'une réunion publique, dont trois élues issues des rangs de la droite. L'équipe de la maire sortante, de son côté, a engrangé les soutiens de Génération.s, Place publique et plusieurs élus écolos, en attendant le probable soutien des communistes.
Benjamin Griveaux, candidat à l'élection municipale à Paris, présente son «Grand Quartier libre» au Théâtre du Gymnase, lundi. (Albert FACELLY/Photo Albert Facelly pour Libération)
publié le 26 novembre 2019 à 6h06

Benjamin Griveaux debout sur scène, les manches retroussées, pour répondre aux questions de la salle. Pour son «quartier libre grand format», organisé au Théâtre du Gymnase, dans le Xarrondissement, le candidat officiel LREM a répété une formule plusieurs fois éprouvée depuis son investiture. Mais cette fois, après deux heures d'échange sur des sujets allant de la sécurité à l'immobilier, l'aspirant maire a présenté plusieurs têtes de listes. L'avocate Sophie Segond dans le VIIIarrondissement, Karim Amellal, enseignant à Sciences Po, dans le Xe, et un entrepreneur, Guillaume Poitoux, dans le XIe, pour les candidats estampillés «société civile». Pour le reste, le casting est marqué à droite : la maire sortante Florence Berthout, ancienne patronne du groupe LR à Paris, soutien de François-Xavier Bellamy aux européennes, est tête de liste dans le Ve, Delphine Bürkli, élue elle aussi sur une liste UMP en 2014, dans le IXe, et Philippine Hubin, adjointe de Rachida Dati dans le VIIe. Un débauchage chez sa concurrente de droite qui pourrait devenir très embarassant : dans une série de tweets déterrés, la candidate multiplie les attaques contre la secrétaire d'Etat chargée de l'Egalité Marlène Schiappa mais aussi le président du MoDem François Bayrou et Emmanuel Macron. «Une identitaire», affirme le camp Villani.

«On ne cite pas les gens de gauche mais il y en a autant que de droite», assure Marie-Laure Harel, conseillère de Paris et porte-parole de Griveaux. Exemple : Frédérique Calandra, maire sortante du XXe, brouillée depuis plus d'un an avec les socialistes qui l'ont fait élire en 2014 pour ses penchants macronistes, et désormais candidate avec Griveaux. Egalement cité comme venant des rangs de la gauche, Pacôme Rupin, député LREM de Paris, dont la candidature dans Paris centre, regroupement des quatre premiers arrondissements, a aussi été annoncée ce soir.

«Son adversaire, c’est la gauche»

«Il annonce des candidats dans le Xe, XIe, XXe… les arrondissements dans lesquels la gauche est implantée depuis 95, mais dans le XVe ou le XVIIe, où il y a des sortants de droite, il ne joue pas l'affrontement», analyse au contraire un conseiller municipal écolo. Philippe Goujon et Geoffroy Boulard, respectivement maires du XVe et du XVIIe, mais aussi Jean-Pierre Lecoq dans le VIe, expliquent depuis plusieurs mois vouloir conduire des listes de rassemblement, allant du centre à la droite. En désaccord avec la volonté de Rachida Dati de mettre en avant l'étiquette LR, ils revendiquent de discuter avec LREM. Pas de tête de liste annoncée non plus dans le XVIIIe, où se présente Pierre-Yves Bournazel, député de Paris membre d'Agir, groupe de parlementaires Macron-compatibles issus de la droite. «Le choix des arrondissements où il met des têtes de liste est un signal clair : son adversaire c'est la gauche, pas la droite», poursuit l'élu interrogé. Lors de sa réunion publique, le candidat a en effet concentré ses attaques contre la majorité, qui abriterait par exemple «des aficionados du modèle vénézuélien», mais épargné Rachida Dati.

Le rejet la semaine dernière à l'Assemblée nationale d'un texte porté par la maire de Paris permettant la création d'une police municipale a également été perçu par les socialistes comme une attaque du camp Griveaux. Absent lors du vote, ce dernier aurait manœuvré pour entraver le projet de la maire sortante. Projet qui fait partie de ses promesses de campagne, comme de celles de Cédric Villani (LREM) et Pierre-Yves Bournazel (Agir) qui, eux, ont soutenu l'amendement.

«Il prend l'espace à droite, analyse un conseiller municipal LR désormais proche de LREM. Hidalgo fait le plein à gauche et Villani lui prend une part de l'électorat En marche plutôt ancré à gauche donc il prend là où il peut.» Le candidat LREM dissident a en effet multiplié les signes d'ouverture à gauche, avec un clin d'œil appuyé aux écolos, poussant Griveaux à se retrancher sur sa droite. L'équipe du mathématicien, qui a notamment proposé d'organiser un référendum sur la réforme des retraites, répète en boucle sa volonté d'organiser un rassemblement, de «Belliard à Bournazel».

Pas de divergences de taille entre communistes et la maire sortante

Pendant que Griveaux braconne à droite, Paris en commun, l'association de campagne de la maire sortante, qui ne compte pas se déclarer officiellement avant le début de l'année prochaine, démarche à gauche. La semaine dernière, elle a engrangé le soutien de Place publique, le mouvement lancé par Raphaël Glucksmann aux européennes, et de Génération.s. Sept à huit sièges éligibles seront attribués aux candidats du parti créé par Benoît Hamon, dont une pour Carine Petit, maire sortante du XIVarrondissement. Elue sur la liste d'Anne Hidalgo en 2014, elle avait annoncé son ralliement avant le vote des militants.

Avec le PC, qui avait choisi l'alliance dès le premier tour en 2014, les choses sont bien engagées. Socialistes et communistes parisiens font passer le message : entre eux, pas de désaccords de taille et beaucoup de convergences. La semaine dernière, Ian Brossat, adjoint au Logement et chef de file du PC, se réjouissait par exemple du référendum sur Airbnb promis par Anne Hidalgo. Une proposition qu'il portait.

Plusieurs élus issus des rangs d'EE-LV ont aussi annoncé soutenir la candidature de la maire sortante. Christophe Najdovski, adjoint aux Transports, Célia Blauel, adjointe à l'Environnement, Aurélie Solans, conseillère de Paris et Bernard Jomier, également conseiller et sénateur de Paris sont ainsi allés à contre-courant de leur famille politique. Comme les Insoumis, réunis derrière Danielle Simonnet et l'ex-footballeur Vikash Dhorasoo, les Verts ont décidé de se lancer seuls, représentés par David Belliard, leur tête de liste. Forts de leur score aux européennes, contrairement aux petits 3,2% des communistes, les écolos veulent peser dans la campagne. Dans le Xe et le XVIIIarrondissements notamment, les socialistes avouent envisager une percée verte. «On a deux projets de société différents», affirme un conseiller EE-LV de Paris qui s'étonne de la probable candidature d'Anne Hidalgo dans le XIe arrondissement, face à David Belliard. Un mauvais signal, alors que les deux formations devraient, comme en 2014, s'allier au second tour.